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Musique et musiciens d’Église des collégiales de PARIS autour de 1790
| Sommaire *L'ensemble des lieux de musique à Paris est prévu en quatre synthèses : cathédrale, collégiales, paroisses, abbayes et couvents. La liste complète des musiciens de Paris se met à jour au fur et à mesure de ces publications.
Url pérenne : http://philidor.cmbv.fr/musefrem/collegiales-de-paris |
Vue de Paris (détail) par Frederick Bernard Werner, 1740 ; sont ici visibles la Sainte-Chapelle (22), Saint-Merry (28) et le Saint-Sépulcre (34) (source gallica.bnf.fr / BnF, Cartes et plans, GE D-27823 RES)
Paris, à la fin du Moyen Âge, compte seize églises ou chapelles pourvues du statut de collégiale, c’est-à-dire desservies par un chapitre de chanoines séculiers et non par un clergé paroissial : quatre « filles de l’Évêque » (sujettes de l’évêque, puis archevêque, de Paris), Saint-Marcel, Saint-Germain-l’Auxerrois, Sainte-Opportune et Saint-Honoré ; quatre « filles de Notre-Dame » (sous la dépendance du chapitre du même nom), Saint-Merry, Saint-Benoît dit le Bétourné, Saint-Étienne-des-Grès et le Saint-Sépulcre ; et huit autres ayant une organisation spécifique, Saint-Aignan, Saint-Jean-le-Rond, Saint-Denis-du-Pas, Saint-Symphorien, la chapelle du palais épiscopal, la Sainte-Chapelle du Palais, Saint-Thomas-du-Louvre et Saint-Jacques-aux-Pèlerins.
Collégiales de Paris, 1790 (fond de carte : Nouveau plan routier de la ville et faubourg de Paris de Jacques Esnault, 1782 ; source gallica.bnf.fr / BnF, Cartes et plans, GE C-9031)
En 1790, il en subsiste onze. Saint-Aignan, Saint-Symphorien et la chapelle du palais épiscopal ont perdu ce statut avant 1700. En 1739, la voûte de l’église Saint-Thomas-du-Louvre s’effondre, tuant six chanoines. Le chapitre de Saint-Louis-du-Louvre naît l’année suivante de la fusion de Saint-Thomas-du-Louvre et de son voisin, Saint-Nicolas-du-Louvre. En 1744, le chapitre de Saint-Germain-l’Auxerrois est réuni à celui de Notre-Dame : l’église n’est plus que paroissiale à la Révolution. Enfin, le chapitre de Saint-Jacques-aux-Pèlerins (ou Saint-Jacques-de-l’Hôpital) connaît un sort semblable en 1781, lorsque les biens de la maison sont attribués à l’hôpital des Enfants-Trouvés. Deux collégiales, étroitement associées au chapitre de la cathédrale Notre-Dame, ont été précédemment étudiées avec cet établissement et il n’en sera pas question ici : Saint-Jean-le-Rond et Saint-Denis-du-Pas. Restent neuf collégiales, dont cinq étaient aussi des églises paroissiales (la Sainte-Chapelle, Sainte-Opportune, Saint-Benoît, Saint-Merry et Saint-Louis-du-Louvre).
Ces collégiales se trouvent sur le territoire du district de Paris, l’un des trois formant le département de Paris créé en janvier 1790. La quasi-intégralité de la série L de ce département a disparu dans l’incendie de l’hôtel-de-ville en 1871. Heureusement, comme pour la cathédrale, nous disposons, aux Archives nationales (site de Paris), d’une collection de registres capitulaires presque complète pour le règne de Louis XVI (à partir de 1780 pour Sainte-Opportune) et d’une série de comptes qui s’interrompent souvent avant la Révolution mais apportent des éclairages utiles, sur les rémunérations en particulier (séries LL et H5). En outre, les déclarations de biens et de charges conservées en série S fournissent des renseignements précieux sur les édifices, le mobilier des églises et le personnel. Enfin, les séries D/XIX (Comité ecclésiastique) et F/19 (Cultes) recèlent quelques listes d’employés et suppliques qui, sauf exception, ne permettent pas de déterminer si les demandes de pension ont été satisfaites après la suppression des chapitres.
| Chapitre | Adresse | Chanoines | Revenus | Charges | Décl. | Sources (Arch. nat.) |
| Ste-Chapelle | Cour du Palais | 12 | 110917 | 66806 | 26/02/1790 | S 943/A, S 7053 |
| St-Marcel | Faubourg St-Marcel | 15 | 38223 | 10990 | 15/02/1790 | S 1914, S 7557 |
| St-Honoré | Rue St-Honoré | 12 | 153513 | 64346 | 22/02/1790 | S 1822 |
| Ste-Opportune | Place Ste-Opportune | 8 | 96907 | 14891 | 23/02/1790 | S 1958 |
| St-Étienne-des-Grès | Rue St-Jacques | 12 | 13041 | 9359 | 26/02/1790 | S 907, S 7053 |
| St-Benoît | Rue St-Jacques | 6 | 10924 | 6843 | 18/03/1790 | S 889/A |
| St-Merry | Rue St-Martin | 7 | 31913 | 7226 | 18/02/1790 | S 910 |
| St-Sépulcre | Rue St-Denis | 12 | 27514 | 13335 | 22/02/1790 | S 922 |
| St-Louis-du-Louvre | Rue St-Thomas-du-Louvre | 22 | 98562 | 43118 | 15/02/1790 | S 1854 |
***
I - La Sainte-Chapelle du Palais, l’un des lieux de musique les plus prestigieux du royaume
••• Un chef-d’œuvre de l’architecture gothique au cœur du Palais de Justice
Sainte-Chapelle du Palais, dessin de Nicolas Ransonnette, fin XVIIIe siècle (source gallica / BnF, Estampes et photographie, RESERVE FOL-VE-53 E)
À la fois « monument reliquaire » et « sanctuaire royal » (Grodecki, 1960), la Sainte-Chapelle du Palais est née de la volonté du roi Louis IX de procurer l’écrin convenable à l’inestimable trésor des reliques de la Passion qu’il venait d’acquérir (1239-1241) de l’empereur latin de Constantinople : la couronne d’épines, une partie de la « vraie croix », la sainte éponge et la sainte lance qui servit pour percer le flanc de Jésus crucifié. Un merveilleux, lumineux et délicat édifice est bâti en un temps record dans l’enceinte de son palais, sur l’île de la Cité, grâce à d’importantes ressources, chef-d’œuvre de l’architecture gothique et de l’art du vitrail médiéval. La consécration solennelle eut lieu en 1248, mais le pape avait déjà octroyé des privilèges, tandis que le roi avait organisé la garde des reliques, véritable « palladium » du royaume de France, et la célébration du culte par l’institution en 1246 d’un corps de chapelains. Ces derniers ont également pour fonction de prier pour le salut des membres de la famille royale. C’est ainsi qu’en janvier 1757, le chapitre ordonne les prières des Quarante-Heures après l’attentat de Damiens. On expose le Saint-Sacrement après la grand-messe, on chante en faux-bourdon pendant le salut l’hymne Pange Lingua, le Domine, salvum fac regem et puis, ce qui est particulier à cette église, l’antienne des Saintes Reliques. Le roi Philippe V érige les chapelains en chanoines en 1318, et dès lors on peut parler de chapitre. La Sainte-Chapelle haute accueille le chœur canonial tourné vers le grand autel sur lequel repose la châsse contenant les reliques, le manteau de pourpre, le roseau, les menottes et le saint suaire. Jusqu’à la Révolution, les chanoines se répartissent les horaires de garde et de prière devant la châsse. La basse Sainte-Chapelle sert d’église paroissiale pour les habitants du petit quartier canonial qui s’est développé aux alentours. En 1505, on compte six chapellenies en haut et dix-sept en bas. Les grâces et les dons n’ont jamais cessé de pleuvoir au fil des siècles, comme le prouve l’inventaire des armoires de la sacristie haute en 1791. Une « grande châsse d’argent dorée représentant le model en petit de l’église de la Ste Chapelle garnie de différentes pierres de couleurs telle que saphirs [...], mauvaises émeraudes, rubis, balais perrés et cabochons », figure en tête d’une longue énumération (52 références) d’objets liturgiques de valeur. Le chapitre ne relève pas de l’autorité de l’évêque de Paris mais directement du Siège apostolique (le trésorier porte la mitre et l’anneau). Il jouit également du droit de committimus, ce qui signifie qu’il est en droit de présenter directement ses causes aux Requêtes de l’Hôtel ou du Palais.
L’organisation spatiale n’a pratiquement pas changé des origines au règne de Louis XVI. Un bâtiment appelé « Trésor » est accolé à l’église du côté nord. Le rez-de-chaussée est réservé à la sacristie de la chapelle basse avec son coffre de la bourse et aux archives, le premier étage à la sacristie de la chapelle haute, aux reliques du trésor ordinaire et aux objets et ornements liés à la célébration du culte. Face à l’entrée de la Sainte-Chapelle se trouve la Chambre des Comptes. En janvier 1776, un incendie ravage le Palais. Le feu détruit tout ce qui se trouve entre la Sainte-Chapelle et la Grand’chambre du Parlement, en particulier le logis de Philippe le Bel. La reconstruction, financée par un impôt spécial, est confiée à trois architectes qui décident d’élargir la Cour de Mai. Plusieurs dépendances du chapitre sont concernées. En janvier 1780, le chapitre récuse le plan proposé car une partie du bâtiment de la maîtrise risque d’être amputée et le nouveau terrain proposé est jugé trop humide.
L’inventaire de la Sainte-Chapelle effectué en novembre 1790 énumère, dans la chapelle haute, « un pupitre de fer bronzé posé sur un pied de bois en forme de coffre, quarante trois vieux livres à usage d’église de différentes grosseurs et deux banquettes couvertes de panne rouge, un tapis de pieds, huit escabeaux [...], un buffet d’orgue [...], quatre pupitres de stales montés en fer ». Une partie de ce mobilier liturgique est sans doute disposée dans l’espace qui sépare les stalles, également mentionnées. Des tableaux accrochés ici et là rappellent, comme les vitraux, la Passion et la résurrection du Christ ; ils côtoient des groupes statuaires d’époque gothique ou Renaissance dont les Quatre anges en bronze, œuvre de Gougeon ou de Pilon. Dans la sacristie haute, « il s’est encore trouvé plusieurs paquets de vieux papiers noté de plein chant et vieux livres hors de service ». Dans la chapelle basse, on relève un pupitre en bois pliant couvert de tapisserie, trois escabeaux pour les chantres, trois antiphonaires et deux missels romains. Dans l’un des murs de la nef se trouve, scellé, un coffre-fort appartenant à la confrérie des garçons marchands érigée en l’église de la basse Sainte-Chapelle. Au milieu de l’énumération des cénotaphes et plaques funéraires en marbre (quelques-uns concernant d’anciens chantres et musiciens), on n’oublie pas de mentionner, au sol, « une plaque simple en pierre inscrite en l’honneur de Boileau Despreaux, enterré précisément sous ce fameux lutrin qu’il a si bien chanté », allusion au poème parodique Le Lutrin de Nicolas Boileau (1672-1674). Parmi les somptueux ornements liturgiques, ceux portés par les enfants de chœur sont parfois sommairement décrits (« quatre chapes d’enfant de damas cramoisi les orfrois de Dauphine à fleurs galonnés en or faux »). Signalée dans tous les guides touristiques de la seconde moitié du XVIIIe siècle, la Sainte-Chapelle du Palais attire déjà de nombreux visiteurs, y compris des personnages illustres. Le 17 juin 1782, par exemple, le comte et la comtesse du Nord (pseudonymes du tsar Paul Ier et de la tsarine), accompagnés de l’ambassadeur de Russie et des magistrats du parlement de Paris, viennent admirer l’édifice et se recueillir devant les reliques de la Passion.
••• Une institution capitulaire à l’identité bien affirmée
• Les revenus et l’organisation de la musique
Les importants revenus du chapitre proviennent de l’exploitation de biens-fonds dans la capitale (maisons et appartements loués à des artisans ou boutiquiers voire à la ville) et à la campagne (Île-de-France, Normandie, Champagne, forêt d’Orléans). Certains de ces biens appartenaient jadis à la puissante abbaye rémoise Saint-Nicaise, dont le vaste temporel a été attribué en 1641 aux chanoines « en remplacement des régales qui avaient jusqu’alors servi de dotation à cette Église ». Un partage des rentes a été réalisé par un arrêt du Grand Conseil du 21 août 1761. Une délibération du 26 décembre 1787 évoque cependant la « situation fâcheuse » des finances de la Sainte-Chapelle, à cause du coût d’un procès contre les religieux de Saint-Nicaise, de la reconstruction des maisons et plus généralement de la diminution considérable des revenus. Il est alors décidé de baisser les revenus des chanoines et du trésorier « pour ne pas diminuer les rétributions ordinaires des chapelains et des clercs ». En 1789, la compagnie déclare 104 000 livres de dettes.
Le 27 novembre 1790, jour de la fermeture de l’établissement, un État de MM. les Chanoines, Chapelains Royaux et Perpétuels, chapelains ordinaires, clercs et Marguilliers de la haute et basse Sainte Chapelle de Paris est annexé au procès-verbal d’apposition des scellés. Seule la dignité de trésorier y est mentionnée. Pourtant, depuis 1319, un chantre élu joue un rôle important au moment de l’audition des nouveaux chantres et musiciens, chargé en particulier de vérifier s’ils savent le chant sur le livre. En janvier 1770, l’élection a permis la désignation comme chantre de Jacques Léon de Perthuis, le candidat du chapitre, qui était aussi celui du roi. La gestion de la musique s’avère difficile car partagée entre plusieurs autorités. Un projet de règlement des années 1760 permet de se faire une idée de l’organisation complexe qui ne pouvait que générer des conflits. Le trésorier possède la « cure des âmes » dans le cloître et nomme son officialité (tribunal ecclésiastique). Il peut choisir un grand vicaire pour le représenter, jadis un chanoine, après 1780 un chapelain, ce qui est source de tensions avec les chanoines. Il confère les chapelles dont il possède la collation et installe au chœur les chanoines et les chapelains perpétuels une fois le brevet de ces derniers déposé et accepté, ainsi que tous les autres membres du bas chœur. Le chapitre, de son côté, est chargé de maintenir le bon ordre dans l’église en général et dans le chœur en particulier et décide de tout ce qui ne dépend pas de la juridiction du trésorier. Il a notamment le pouvoir de renvoyer les gagistes. La discipline dans la maison des chantres est assurée par le chapitre et le trésorier de conserve. La nomination des chantres, musiciens, enfants de chœur et maîtres relève en théorie de l’assemblée des trésorier, chantre et chanoines à la pluralité des suffrages, sans autre formalité que d’inscrire leurs noms sur les registres de la compagnie qui les loge et gratifie en fonction de leurs service, talents et assiduité. On est reçu « sous la prébende de » celui qui est en tour (inscrit sur le tableau des semaines) et a procédé à la nomination. Les maîtres de musique sont désignés toutefois exclusivement par le trésorier, comme le prouve une délibération du 30 janvier 1745, qui évoque l’installation dans le chœur du « sieur Abel François Fanton, prêtre du diocèse de Xainte, que mr le Trésorier a choisi pour remplir la place de maître de musique qu’occupoit cidevant le sr de la Croix ». La Chambre des Comptes a aussi son mot à dire dans la gestion de la maîtrise, puisque c’est elle qui rémunère le maître de musique et verse la gratification de sortie des enfants de chœur.
• Un calendrier et un rite propres
La Sainte-Chapelle du Palais possède comme toutes les autres saintes-chapelles un calendrier liturgique qui lui est spécifique, même s’il est construit à partir du calendrier romain, qui prévoit des degrés de solennité pour toutes les fêtes qui y sont inscrites. Le chanoine Morand, dans ses Constitutions de 1779, consacre sept pages au De officio organistae, qui récapitule toutes les interventions de l’orgue par type de fête et précise le rôle de chaque intervenant du haut et du bas chœur. En ce qui concerne le rite suivi à la Sainte-Chapelle, Bernard Dompnier a pu s’appuyer sur ces mêmes Constitutions afin de clarifier la situation. Ce n’est qu’en 1610 que les chanoines abandonnent le rite parisien au profit du rite romain que l’on suivait déjà dans la Chapelle du roi. Morand ajoute que, « quant aux cérémonies qu’on y observe, elles sont mal-à-propos mêlées du Romain et du Parisien », surtout depuis une sentence arbitrale de septembre 1657 qui ordonne d’observer le « cérémonial romain », inspiré par le rite du même nom. Léonard Poisson, dans son Traité théorique et pratique du plain-chant appelé grégorien paru en 1750, fustige les fâcheuses répercussions sur le chant qui est devenu un « mélange […] tant dans les hymnes que dans la psalmodie, souvent bizarres et de mauvais goût ». En réalité, les chanoines semblent pour certains d’entre eux partisans de l’usage parisien et vont jusqu’à proposer un cahier « pour les fêtes particulières de ladite Sainte-Chapelle ». Sans véritable autorisation, les inflexions vers le rite parisien se multiplient, comme le montre l’adoption, en 1670, d’un office de l’Exaltation de la Croix. Cette confusion autour du rite correspond à ce que l’on observe dans un grand nombre d’établissements capitulaires. Les usages romains progressent partout au cours du XVIIe siècle, puis on assiste à un retour en force des liturgies néo-gallicanes à la fin de ce même siècle (Dompnier, 2015). Cependant, conserver le rite romain peut être un moyen pour les chapitres de réaffirmer leur indépendance vis-à-vis de l’Ordinaire. Dans le cas de la Sainte-Chapelle, le trésorier en est un grand partisan, sans doute parce que cela lui permet d’affirmer son autorité face aux chanoines dont beaucoup penchent pour l’autre rite, comme c’est le cas dans bon nombre de compagnies capitulaires au XVIIIe siècle. En 1741, le grand chantre présente un cérémonial accepté par le chapitre, mais la délibération ne précise pas quel rite est suivi.
••• La musique et les musiciens à la Sainte-Chapelle
Le chanoine Morand fait paraître en 1790 une Histoire de la Sainte-Chapelle royale du Palais, enrichie de planches, dans laquelle il consacre plusieurs pages à l’orgue et à la musique. « Quelques personnes ont prétendu que le vaisseau de la Sainte-Chapelle n’étoit point propre à la Musique, écrit-il, & en donnoient pour raison qu’il est trop ouvert & trop garni de vîtres, qui cassent la voix. Cependant, on y a souvent entendu une Musique assez bonne, soit que l’on y ait de meilleurs Musiciens dans certains tems que dans d’autres, soit que cela vient du talent & de l’exécution momentanée des Musiciens, soit de l’habileté, & de la composition des Maîtres de Musique tout ensemble, qui savoient s’accommoder à l’incommodité du vaisseau. L’on se rappelle encore avec plaisir, & l’on citera toujours le tems des Fanton, Syonnet, Doriot, Malines, Lacroix & Platel [etc] ».
• Un lieu de musique sans équivalent
L’Almanach du voyageur à Paris des années 1784-1785 place la Sainte-Chapelle parmi les lieux où il faut aller pour entendre de la belle musique à l’occasion de manifestations publiques anciennes. Ainsi, on annonce pour le 4 avril 1784, jour des Rameaux, une « Passion [...] chantée & dialoguée [...], partie en plein-chant, partie en musique par le Célébrant, le Diacre & le Chœur. Le Célébrant chante la partie de Notre-Seigneur, le Diacre celle de l’Evangéliste & la musique du Chœur, la partie du Peuple. Cet ancien usage y attire tous les ans beaucoup de monde ». La proximité de la Semaine sainte est aussi l’occasion de la réception de la Chambre des Comptes qui vient adorer la « vraye croye » la veille des Rameaux. On peut citer d’autres fêtes où l’organiste touche son instrument devant un public étoffé et connaisseur comme celle de la Dédicace en avril ou celle du « Chef de saint Louis » en mai. L’autre grand moment dans le calendrier liturgique est la « messe rouge » (couleur de la robe des parlementaires) le jour de la rentrée du Parlement, de la Cour des Aides et de celle des Monnaies. Parfois, un évêque vient célébrer une messe en musique avec symphonie en la chapelle Saint-Nicolas, dans la grande salle du Palais, accompagné de deux chanoines faisant office de diacre et de sous-diacre d’honneur et de deux chapelains perpétuels assurant les mêmes fonctions. On peut également évoquer les messes célébrées dans la chapelle haute lors des rares venues des rois à l’occasion des lits de justice. Le 8 juin 1725, Louis XV assiste à une messe basse durant laquelle est chanté un motet « sous la mesure du Sr Bernier, maître de musique [...], par les musiciens du Roy et ceux de la Sainte-Chapelle, qui estoient placez au-dessus du maistre autel près des Saintes Reliques ». Le 13 novembre 1774, Louis XVI se déplace pour écouter la messe à huit heures du matin et entendre un motet, imité par ses frères quelques semaines après.
Par ses usages musicaux, la Sainte-Chapelle se démarque des cathédrales et collégiales françaises. Lors de la messe quotidienne, l’introït, le graduel, l’Alleluia, l’offertoire et la communion sont chantés en faux-bourdon ou chant sur le livre, un procédé d’improvisation consistant à ajouter une ou plusieurs voix à une mélodie écrite. Le Kyrie, le Gloria in excelsis, le Credo, le Sanctus, l’Agnus Dei, mais aussi l’O Salutaris et le Domine, salvum fac regem le sont en musique. En cette circonstance, l’orgue reste muet : son emploi est réservé aux messes des fêtes solennelles et d’une partie des doubles, pour mieux les solenniser. On l’entend plus particulièrement lors des fêtes de la Transfiguration, de la Présentation de la Vierge et de la Visitation. L’organiste ne monte à la tribune que 71 jours par an, ce qui est peu, pour un peu plus de 160 services, sans compter les saluts et stations, où sa présence est souvent requise. L’alternance orgue / polyphonie est courante, celle associant l’orgue au plain-chant (chant à une voix) rarissime voire inexistante. Le plain-chant n’est d’ailleurs guère à l’honneur à la Sainte-Chapelle. Le nombre élevé de musiciens et d’enfants favorise en revanche la pratique du faux-bourdon et permet de l’organiser en deux chœurs alternés, « une option assez rare » (Naulleau, 2025). Le Magnificat est interprété en faux-bourdon, non en musique figurée : une autre spécificité locale.
• Les maîtres de musique
Tout au long du XVIIIe siècle, la Sainte-Chapelle a rayonné sur le plan artistique grâce à ses maîtres de musique et à leur talent pour la composition. Les deux premiers sont de loin les plus connus : Marc Antoine CHARPENTIER (1698-1704) et Nicolas BERNIER (1704-1726). Ce dernier a obtenu le poste grâce à l’appui du régent Philippe d’Orléans. Chargé d’importantes fonctions à la Chapelle royale de Versailles, il laisse la place à son élève et disciple François DE LA CROIX (1726-1745). Après lui, les chanoines choisissent Abel François FANTON (1745-1756), qui vient de province mais qui a bâti sa réputation grâce aux œuvres qu’il a fait jouer au Concert spirituel. Après sa mort, Henri BRÉVAL (1756-1758) ne fait que passer, vite aspiré par une carrière canoniale en Picardie. C’est lui qui compose le motet exécuté lors de la venue du roi en décembre 1756 (212 livres de frais). Lui succède François Robert DORIOT (1758-1783), qui marque durablement de son empreinte l’établissement. Peu avant la Révolution, il est avec le maître de musique de la cathédrale Notre-Dame de Paris, Jean-Baptiste François GUILLEMINOT DUGUÉ, l’une des sommités de la musique d’Église, souvent consulté par les chapitres de province en quête d’un maître ou d’un musicien doté des meilleures capacités. Sa renommée a été progressivement ciselée au Concert spirituel et lors des grands évènements concernant la Sainte-Chapelle (motets, oratorios). Il prend sa retraite en 1783, tout en conservant son bénéfice de chapelain perpétuel. Les chanoines emploient ensuite André Étienne LEPREUX (1783-1788), ancien maître de musique à Saint-Germain-l’Auxerrois, loué dans la presse pour son talent de compositeur. Lui aussi s’est fait un nom au Concert spirituel : « Digne Élève et successeur de l’Abbé d’Audimont, & Maître de Musique de la Sainte-Chapelle, [il] est Auteur de plusieurs Te Deum qui ont eu le plus grand succès, & a fait exécuter au Concert Spirituel un Motet & une Scène Sacrée, qui ont ajouté beaucoup à la haute réputation qu’il s’est si justement méritée » (Tablettes de renommée, 1785). Malheureusement, la mort le fauche alors qu’il n’a pas encore 30 ans. De 1788 à 1790, c’est Jean Nicolas FRÉCHON, l’un des chantres de l’établissement, qui prend la relève dans un contexte tourmenté. Le chapitre lui confie toutes les responsabilités musicales, se souvenant que dans sa jeunesse, il a été maître de musique des cathédrales de Bayeux et de Châlons. L’abbé DORIOT accepte de son côté de prendre la direction de la maîtrise des enfants de chœur. Le budget prévoit une somme de 3 000 livres par an pour ce poste de dépense. La déclaration de revenus de FRÉCHON ne précise pas sa rémunération.
• Les chanteurs et instrumentistes du « collège de musique »
Le roi François Ier rappelle en 1522 qu’il faut appliquer dans le recrutement du personnel musical de la Sainte-Chapelle la même exigence que celle qui était prévue par les statuts de fondation : « Il convient à présent prendre lesdits Chapelains & Clercs souverains en l’art de musique, qui est difficile chose à trouver, pour servir en icelle Sainte-Chapelle. Aujourd’hui ce Collège de musique est encore composé de la même manière, savoir, de 6 Bénéficiers, et de 10 Clercs qui aspirent avec le tems à être Bénéficiers à leur tour [...]. Ainsi ces Musiciens, qui seroient offensés d’en recevoir le titre, attendu qu’ils sont établis sur le pied de Notabiles viros [au premier degré, d’hommes nobles, c’est-à-dire, ici faisant partie du groupe des ordres privilégiés], sont tous plus ou moins engagés dans les Ordres » (Calendrier musical universel, 1789). Certains de ces chapelains ou clercs dits « ordinaires » ont pu débuter leur carrière à la Sainte-Chapelle comme simples gagistes révocables à tout instant, mais ceux d’entre eux qui ambitionnent une promotion doivent se résoudre à opter pour l’état ecclésiastique. Ainsi, le 21 décembre 1765, « le sieur Cachelièvre, chantre, désirant s’attacher plus particulièrement au service de la Ste Chapelle, s’est présenté à la Compagnie et l’a supplié[e] de lui permettre d’aller en retraite à St Lazare pour se préparer à recevoir la tonsure ». Parmi les gagistes, on peut placer les musiciens qui viennent jouer ou chanter lors des grandes cérémonies (fête patronale, venue du roi, octave de Pâques, cérémonie des Ténèbres). Les chanoines font ainsi régulièrement appel à la fin des années 1780 à Jean-Baptiste DESSÉ, qui vient jouer du violoncelle, et à d’autres musiciens externes anonymes.
Les dénominations de chapelain et de clerc sont fort anciennes et propres à cette église. Elles recouvrent des fonctions cantorales et musicales précises prévues par les statuts. En 1790, on relève parmi eux trois joueurs de serpent et de basson, une haute-contre, une taille, quatre basses-tailles, trois basses-contre et deux chantres dont la tessiture n’est pas connue. Outre leurs compétences musicales, les chapelains doivent faire face à des obligations liturgiques inhérentes à leur statut de bénéficier.
En théorie, tous les chapelains et clercs, hormis ceux qui font uniquement fonction de sacristain, sonneur ou marguillier, sont des musiciens ou des chantres travaillant sous la direction du maître de musique, lui-même souvent un chapelain. Les chanteurs doivent descendre à l’aigle pour y chanter la musique et le plain-chant. La catégorie des bénéficiers est divisée en deux groupes, celui des chapelains royaux ou perpétuels et celui des chapelains ordinaires. Les clercs ne font pas partie des bénéficiers, ce qui les distingue des chapelains ordinaires.
Les six chapelains perpétuels actifs en 1790 sont François Robert DORIOT, Joseph Honoré RAYMOND, Antoine Étienne Nicolas FANTIN DES ODOARDS, Claude ASSELIN, Armand Henri de LA BACHELLERIE et Pierre TISSET. Ils viennent tous de régions différentes (Provence, Dauphiné, Limousin, Auvergne, Brie, Paris) et sont pour la plupart en place depuis peu (douze ans d’ancienneté en moyenne). La moyenne d’âge s’établit à un peu moins de 58 ans.
Selon leurs statuts, réaffirmés à la suite d’une période d’anarchie par des arrêts du Conseil sous le règne de Louis XIV, les chapelains perpétuels doivent assister à tous les offices de jour et de nuit, aux fondations, servir de diacre et sous-diacre aux chanoines, porter la chape au chœur, « descendre à l’aigle pour y chanter le plein chant, les antiennes, leçons et repons ainsi qu’il leur sera marqué par le chantre dans la table du chœur qui sera faite par chacune semaine [...]. Seront aussi tenus lesdits chapelains perpétuels de chanter la musique avec les chapelains et clercs du trésorier et chanoines, s’ils n’en sont spécialement dispensés par le Roi » (arrêt du Conseil du 19 mai 1681, rappelé par les chanoines au secrétaire de la maison du Roi dans un courrier du 11 décembre 1779). On obtient une chapelle perpétuelle grâce à un brevet royal après le décès ou la démission du précédent titulaire. Les chapelains perpétuels disposent d’un logement de fonction, mais la plupart résident à l’extérieur du quartier canonial en 1790. Leurs revenus s’échelonnent, loyer compris, de 1 989 livres (FRÉCHON) à 3 716 livres par an (LA BACHELLERIE). Certains chapelains perpétuels cumulent les revenus d’autres bénéfices ou des pensions obtenues au cours de leur carrière. Ainsi l’abbé FRÉCHON ajoute à ses revenus de chapelain ceux de trois chapelles dont l’une située au château de Saint-Ouen (2 234 livres pour les trois bénéfices) et l’abbé ASSELIN déclare une pension de retraite d’ancien aumônier des pages de la reine d’un montant de 1 200 livres. Les chapelains perpétuels peuvent prendre un mois de congé par an.
Les cinq chapelains ordinaires se nomment Guy Antoine BRALLE, Anne François DUPREY, Jean François VAVASSEUR, Sébastien François Marie Élisabeth TORCY et Antoine CHAVIALE. Complètent l’effectif les sept clercs ordinaires Nicolas Charles BIDAULT DE GARDINVILLE, Adrien CACHELIÈVRE, Jacques CHAUVET, Jacques François DECOMBE, Léger DOUVILLÉ, Benoît Furcy DE SACHY et Pierre POIRIER.
Les chapelains ordinaires et les clercs aspirent pour la plupart à devenir chapelains perpétuels. L’inventaire après décès de l’abbé Antoine Nicolas MALINES, clerc mort en 1768, est effectué dans l’appartement qu’il occupe au « premier étage de la maison des Chapelains, clercs de ladite Ste Chapelle ». C’est dans ce bâtiment, qui donne sur la cour de Mai et la rue de la Barillerie, que les chantres et musiciens reçoivent un logement plus ou moins vaste. Les registres capitulaires enregistrent les affectations des appartements, selon une sorte de cursus honorum. L’abbé MALINES, disposait d’une chambre, d’une salle de compagnie, d’une cuisine et de deux caves. Le chapitre exige le respect des règles de vie communautaire et s’insurge dans les dernières années de l’Ancien Régime contre un certain laisser-aller, alors que le trésorier n’exerce plus ostensiblement l’autorité qu’il possède de droit sur les bénéficiers et gagistes. Les déclarations de revenus de 1790 révèlent que la maison des chantres a été complètement abattue lors des travaux consécutifs à l’incendie de 1776. Les chapelains et les clercs, dispersés dans six paroisses des alentours (Saint-Barthélemy, Saint-Germain-le-Vieil, Saint-Landry, Saint-Merry, Saint-Séverin, Saint-Sulpice), mentionnent l’indemnité qu’ils perçoivent du Domaine pour compenser la perte de leur habitation (300 livres chez POIRIER, par exemple). En mai 1789, le chapitre avait pourtant avancé la somme de 12 000 livres afin de permettre leur installation dans un nouveau bâtiment.
Les chapelains ordinaires perçoivent davantage que les clercs : la fourchette va pour les premiers de 1 600 (CHAVIALE) à 2 709 livres (VAVASSEUR), de 1 020 (le serpent POIRIER à 2 048 livres (son collègue CHAUVET) pour les seconds. Depuis 1740, la plupart des chantres et instrumentistes ont bénéficié d’une augmentation de gages grâce à un legs testamentaire de 24 000 livres de l’abbé de Champigny, un ancien trésorier. Beaucoup complètent leurs revenus en se faisant pédagogues. Les Tablettes de renommée publiées en 1785 indiquent que dix des maîtres de musique vocale prodiguant des leçons dans la capitale cette année-là sont chantres à la Sainte-Chapelle, soit la quasi-totalité de l’effectif. Le chapitre est très libéral en matière d’avances de gages ou de secours en période de maladie. Même les chantres les plus contestataires ne sont pas abandonnés dans leur détresse. Les uns comme les autres n’ont que quinze jours de vacances.
La moyenne d’âge de ces douze musiciens et chantres s’établit à 44 ans en 1790. Le doyen d’âge (68 ans), également doyen d’ancienneté (51 ans), est l’abbé BIDAULT DE GARDINVILLE, haute-contre, ancien enfant de chœur de la cathédrale Notre-Dame de Paris. Il a obtenu difficilement au début de la décennie les privilèges liés à la vétérance. Le plus jeune (31 ans) est le serpent DECOMBE, seul enfant de chœur formé à la Sainte-Chapelle à avoir été conservé à son service. La moyenne d’ancienneté s’élève à 18 ans. La compagnie n’a plus recruté personne depuis 1787. La moitié de l’effectif a été reçue après 1774. On ignore quel était le poste antérieur pour sept d’entre eux. L’un des cinq restants avait été formé à la Sainte-Chapelle, un autre à la maîtrise de la cathédrale d’Angoulême, un troisième arrivait sans doute directement de sa petite paroisse picarde et le dernier était passé par la collégiale Saint-Pierre-la-Cour du Mans. Les cinq autres étaient auparavant en poste dans les cathédrales d’Orléans, Beauvais et Amiens, dans une paroisse parisienne et à la cathédrale Notre-Dame. On devait entendre plusieurs accents dans la sacristie, avec cinq Picards, trois Parisiens, deux Normands, un Angoumoisin et un Auvergnat dans l’effectif. Une fois à la Sainte-Chapelle, ceux qui se hissent au-dessus de l’état de simple gagiste restent généralement jusqu’à la mort ou bien l’âge de la retraite. La place est bonne, mais parfois les plus belles voix sont repérées et invitées à rejoindre le service du roi. Le chapitre ne peut se permettre de contester une décision qui le met dans l’embarras et devant le fait accompli. Une délibération du 7 mars 1772 évoque « le bruit qui se répand que le sieur Platel, clerc, est arrêté chez le Roy pour le service de la Chappelle ». Charles Eustache PLATEL, basse-taille passée par Notre-Dame, natif de l’Artois, n’est resté en fonction qu’à peine deux ans. C’est le même parcours que suit Barthélemy Henri BOUILLEROT. Il sert les chanoines de 1779 à 1785 : sa voix de haute-contre lui vaut plusieurs augmentations avant qu’on ne le réquisitionne à Versailles. En dehors de la Chapelle royale, il n’y a pas vraiment de concurrents hormis ceux qui proposent un canonicat ou tout type de bénéfice plus rémunérateur ou prestigieux. Ainsi, Louis François FRÉMEAUX est resté chapelain ordinaire dix-sept années avant de devenir chanoine prébendé de la Sainte-Chapelle de Vincennes en 1781.
••• L’orgue et les organistes de la Sainte-Chapelle
« On voit au-dessus de la porte un grand Buffet d’Orgues qui remplit toute la largeur du vaisseau », écrit le chanoine Morand. L’usage de l’orgue à la Sainte-Chapelle est attesté dès 1299, mais les délibérations de la compagnie livrent peu de renseignements sur l’instrument, dont l’entretien est à la charge du trésor royal, tout comme les gages de l’organiste. En cette matière, l’institution décisionnaire est la Chambre des Comptes. En juillet 1752, le chapitre approuve « la construction d’une tribune au-dessous de la rose et pour y placer le buffet de l’orgue » et valide en septembre de la même année les plans de l’architecte Rousset. L’année suivante, une délégation se rend chez le premier président de la Chambre des Comptes afin de demander « pour la décence du service divin le rétablissement de l’orgue et la construction d’une tribune au-dessous de la rose ». La réception de l’instrument par les organistes DAQUIN et BALBASTRE n’a lieu que le 25 mars 1771. « Cet Orgue a été fait presque à neuf par le sieur Clicquot, Facteur d’Orgues du Roi », précisent les Annonces, affiches et avis divers. Morand rend hommage au facteur François Henry CLICQUOT, qui a collaboré avec Pierre DALLERY : « C’est un grand huit pieds bouché des plus complet [sic], à quatre claviers, à ravalement en haut, & ut dièze en bas. L’Artiste a trouvé le moyen de simplifier le mécanisme de l’Orgue, & de faciliter les jeux des claviers ; & si l’on doit lui savoir gré des recherches qu’il a faites pour rendre cette espèce d’instrument plus aisée à être réparée, & par conséquent moins à charge aux propriétaires ». CLICQUOT entretient toujours l'instrument au moment de la fermeture de l'édifice. En 1790, Gervais François COUPERIN est titulaire de l’orgue depuis la mort accidentelle de son père Armand Louis, l’année précédente. Ce dernier avait débuté aux claviers en 1760, succédant à Pierre FÉVRIER (1737-1739), Guillaume Antoine CALVIÈRE (1739-1755) et René DROUARD DE BOUSSET (1755-1760). La dynastie COUPERIN ne fut pas la seule à se distinguer à ce poste : entre 1633 et 1737, Michel DE LA GUERRE et ses fils Jérôme et Marin, époux de la compositrice Élisabeth JACQUET DE LA GUERRE, contribuèrent à faire de la Sainte-Chapelle un temple de la musique sacrée. En 1791, la fabrique de Saint-Germain-l’Auxerrois acquit l’instrument et le fit remonter dans cette église. Les Mémoires historiques de Gilles Dongois mentionnent également un « petit orgue qui est dans le chœur sous le pulpitre et qui sert à accompagner les voix quand on chante musique », offert à la fin du XVIIe siècle par le trésorier Louis Gaston Fleuriau, qui semble avoir disparu depuis longtemps lorsque survient la Révolution (Élissèche, 2022).
••• La maîtrise des enfants de chœur
Huit enfants de chœur servent à la Sainte-Chapelle depuis un règlement élaboré en 1342 par Le Tourneux, secrétaire du roi Philippe VI de Valois. Ils sont placés sous l’autorité de deux maîtres, « l’un appellé Maître-de-chant, pour leur apprendre l’usage de bien chanter avec le chœur, à chanter en motets & à chanter en parties » (en l’occurrence le maître de musique, du moins jusqu’en 1783), l’autre étant le maître de grammaire (Calendrier musical universel, 1789). En novembre 1748, les chanoines réaffirment qu’on « s’en tiendroit toujours à l’usage de ne recevoir point d’enfant de chœur sans concours pour quelque considération que ce soit ». On relève pourtant par la suite des entorses à ce principe. En juillet 1784, le chapitre récuse la nomination forcée d’un garçon protégé par le duc d’Orléans et le prince de Conti. Les registres révèlent que les enfants sont très bien formés à la composition et qu’ils peuvent donner une de leurs œuvres avant de quitter la maîtrise, à deux conditions : uniquement en dehors des grandes fêtes et après avoir obtenu l’accord du chapitre. DORIOT se fait tancer à plusieurs reprises pour violation de ces règles, avec des conséquences dommageables pour les enfants, privés de gratification de sortie. En décembre 1765, par exemple, le chapitre dit avoir « remarqué que le nommé Fiévé, le plus ancien des enfants de chœur, avoit fait chanter en musique de sa composition la messe du chœur et un psaume aux 1res et 2es vespres le jour de Noël, ce qui étoit d’autant plus contraire à la règle que la Compagnie [doit] présumer meilleure la composition d’un maître de musique connu que celle des enfants de chœur ». Joseph Louis FIÉVÉ deviendra vers 1784 maître de musique de la cathédrale de Cahors. Parmi les bons musiciens éduqués à la Sainte-Chapelle, signalons encore Jean-Baptiste PATTE, qui fera carrière à Chartres, Pierre Louis BUÉE, chantre ecclésiastique à la cathédrale Notre-Dame de Paris en 1790 en sa qualité de vicaire de Saint-Victor, ou encore Claude Edme Emmanuel LENOIR, décédé maître de musique à la Sainte-Chapelle de Dijon en 1785.
À la fin de l’année 1790, les huit enfants de chœur signent une requête dans laquelle ils rappellent qu’à leur sortie, « ils auraient dû recevoir une gratification de la chambre des comptes, se montant à 300 lt compris celle que la compagnie leur faisoit et en outre une bourse qu’ils se partageoient entre eux, ce qui se montait à près de 500 lt ». Cette demande de gratification au Comité ecclésiastique est signée par Nicolas Edme CLÉRIN, Laurent DORÉ, Michel Pierre DURAND, le dénommé FEMME, Charles François Dominique Georges LOZET, Charles MARCHAND, Pierre Joseph NANÉE et Nicolas François Barthélemy SIMONNET. Les sources comptables ne soufflent mot des dépenses de la maîtrise car elles sont du ressort du roi, qui y consacre annuellement 10 000 livres d’après le duc de Luynes (1753). Un chanoine « chefcier » (théoriquement celui qui surveille le chevet et le trésor) gère ce budget, sous le contrôle de la Chambre des Comptes. Le duc précise que deux bourses au collège de Navarre sont réservées aux plus méritants des enfants en fin de formation.
Le bâtiment de la maîtrise s’ouvre sur la cour du Palais et comporte deux étages. L’inventaire du mobilier en est dressé en mai 1791 en présence de l’ancien maître des enfants de chœur, l’abbé DORIOT. Il explique avoir laissé un lit à l’un de ses protégés et avoir distribué aux huit enfants en exercice des chemises, coiffes et mouchoirs. C’est la Chambre des Comptes qui était propriétaire des meubles, ustensiles et linges de la maîtrise. Celle-ci comporte plusieurs pièces : une cuisine, un réfectoire, une salle d’études (à l’intérieur, « une grande table à écrire garnie de tiroirs, quatre bancs » et deux armoires), un vestibule donnant sur le jardin, une salle à manger, elle aussi sur le jardin, et un office. Au premier étage, les officiers municipaux visitent un salon (« six fauteuils, velours d’Utrecht cramoisi, six cabriolets, une grande table de marbre sur son pied, un tableau représentant Louis XV, six petits rideaux de taffetas cramoisi, deux tapis de pieds ») et son antichambre, la « chambre du maître », prolongée par une garde-robe et un cabinet, ornée d’une tenture de papier velouté, meublée de six fauteuils de velours d’Utrecht cramoisi, d’un lit fermé de rideaux de camelot rouge, d’un grand fauteuil de velours d’Utrecht rayé, de deux glaces, de deux rideaux et d’une veilleuse. Ils pénètrent ensuite dans un « cabinet de musique » équipé de deux armoires en bibliothèque, dont le contenu n’est malheureusement pas décrit. Contiguë à un autre cabinet, la chambre des enfants renferme huit pavillons de siamoise bleue, huit lits de fer avec paillasses, matelas, traversins et couvertures, huit chaises de paille et trois rideaux de siamoise. L’inventaire mentionne encore une chambre pour le maître de latin dotée d’un cabinet et d’une garde-robe et, au second étage, deux autres chambres, peut-être pour les domestiques.
••• Une crise interne qui sape l’autorité du chapitre à la fin de l’Ancien Régime
En 1786, l’abbé de Montal dénonce un scandale dans une lettre au ministre de la Maison du roi : « L’aîné des enfants de chœur a engrossé la servante au scû de toute la cour du palais et de tous les chapitres de Paris. Un tel événement ne peut être imputé qu'à la négligence des maîtres des enfants, qu’au défaut de résidence de M. le thrésorier et surtout à cette guerre indécente et forcenée qu’il fait à sa compagnie dont il méprise ouvertement les représentations et la part qu’elle doit avoir au bon ordre ». Depuis 1783, le chapitre entretient des rapports conflictuels avec son premier dignitaire, l’abbé de Moy. Dans toute compagnie canoniale, le maintien de la discipline et de l’assiduité n’est pas chose facile, tant dans le bas que dans le haut chœur. Toute compagnie canoniale bataille inlassablement contre ses « dépendants de l’intérieur », observe Philippe Loupès dans son ouvrage sur les chapitres de Guyenne. La stratégie immémoriale des trésoriers de la Sainte-Chapelle consiste à saper l’autorité capitulaire en excitant les chapelains, clercs et autres serviteurs et à contester la moindre décision des chanoines. En 1762 déjà, le chapelain VILLEMAR est à la manœuvre : il dépose au nom de ses confrères un mémoire imprimé, vite récusé. Dans l’affaire, le trésorier refuse de siéger et de prendre les décisions disciplinaires qui lui reviennent statutairement. Désormais, il choisit son grand vicaire parmi les chapelains et non plus les chanoines et bloque toute proposition constructive du chapitre, comme celle, en 1763, consistant à nommer des musiciens gagistes lorsque les clercs tonsurés font défaut. Le ministre de la Maison du roi croule sous les rapports et courriers des deux parties, s’agace et ne répond que rarement. En 1766, on envisage un arbitrage devant le grand aumônier de France, mais rien ne se passe. Sous le règne de Louis XVI, le ministre de tutelle bascule peu à peu dans le camp du trésorier. En novembre 1779, le chapitre refuse d’enregistrer le brevet royal de nomination à une chapelle perpétuelle présenté par Claude ASSELIN, au motif qu’il ne connaît pas la musique. Le Conseil cherche alors à placer des ecclésiastiques qui ont des fonctions à la Cour, dans les diocèses (par exemple un vicaire général d’Embrun) ou qui bénéficient d’appuis en haut lieu. Progressivement se forme un clan regroupant les chapelains perpétuels et le trésorier. Selon eux, le chapitre aurait jadis spolié les chapelains et empêché leur accès au canonicat. À partir de juillet 1784, ils ne viennent plus au chœur, perturbant gravement le service et se moquant des admonestations du chapitre, traité de la dernière des façons, et dont le prestige et l’autorité s’affaiblissent aux yeux des dépendants. Certains chapelains et clercs ordinaires n’ont pas attendu cette époque pour s’émanciper et imposer leur point de vue, à l’image des chantres MALINES, BIDAULT DE GARDINVILLE et de l’ancien maître de musique DORIOT, qui n’ont jamais hésité à réclamer des dispenses de matines et même le privilège de la vétérance, pourtant inexistant à la Sainte-Chapelle, avec le soutien du comte de Saint-Florentin puis du baron de Breteuil, sous couvert du souverain.
Peu à peu, les usages les mieux établis cessent d’être suivis, en particulier le tableau des semaines : le trésorier se permet de nommer des musiciens à la place d’un chanoine dont c’est le tour d’effectuer cette tâche. Certains chapelains et les clercs, agissant comme des « sabotteurs de notre société, vils imposteurs et sujets dangereux qui ne [...] proposent rien moins que l’anéantissement et la dégradation de la Ste Chapelle » (courrier cité en chapitre, avril 1783), multiplient les actions spectaculaires comme le boycott du camail au chœur ou des assemblées générales, avec la complicité du trésorier (1783-1784). Parfois, les voix manquent pour « chanter la musique » (janvier 1785) et il faut dire la messe à voix basse afin de « prévenir un pareil scandalle et autres résultants de l’anarchie générale dans laquelle est tombée cette Église depuis environ deux ans ». En avril 1786, la compagnie n’est même plus capable de se faire respecter des enfants de chœur qui refusent de saluer les chanoines ou de se rendre à des convocations.
C’est dans ce contexte de déliquescence que la compagnie prend connaissance de l’arrêt du Conseil du 11 mars 1787, qui décide la suppression de toutes les saintes chapelles du royaume au motif que les dotations primitives ont été détournées des intentions des fondateurs et qu’elles ont pour la plupart perdu toute utilité. Les biens seront mis sous séquestre et le pouvoir royal devra être consulté avant toute nouvelle dépense. Le service divin sera néanmoins maintenu et les chanoines et chapelains resteront en fonction jusqu’à leur décès, après quoi leurs bénéfices seront mis en régie. L’objectif du souverain est de réunir une masse financière de 300 à 400 000 livres afin d’abonder les ressources « de sa Chapelle et celle de la Reine » et pourquoi pas « d’ériger dans la Chapelle même de Versailles un chapitre composé d’aumôniers, chapelains et clercs dont les places seroient déclarées amovibles ». Les chanoines de la Sainte-Chapelle du Palais, qui espèrent encore pouvoir être exemptés de la loi commune, sont très vite mis devant le fait accompli, dans la plus grande confusion d’ailleurs, car la Chambre des Comptes, qui administre la moitié de ses revenus, a placé ses propres scellés par-dessus ceux du roi. En 1790, c’est une institution quasi-paralysée et discréditée qui s’éteint.
II - Les « Filles de l’Évêque »
Dans la seconde moitié du XVIIIe siècle, la tutelle de l’archevêque sur ses « filles » n’est guère pesante. La procession de l’Ascension, sur l’Île de la Cité, symbolise la sujétion des chapitres de Saint-Marcel, Saint-Honoré et Sainte-Opportune : les chanoines, portant la chape, suivent l’archevêque, revêtu des habits pontificaux. Ils sont par ailleurs susceptibles de participer à des cérémonies extraordinaires « lorsque M. l’Archevêque les [y] mande » (Guillot de Montjoye, 1763).
••• La collégiale Saint-Marcel, un établissement étroitement associé au séminaire voisin
Réputée la plus ancienne de la capitale, cette collégiale a été érigée sur les reliques de Marcel, évêque de Paris mort au Ve siècle, qui aurait libéré la capitale d’un dragon dévastateur. Elle est la plus excentrée de toutes, sur la rive gauche, dans le faubourg qui porte son nom et dont le chapitre était seigneur, dominé par la manufacture de tapisseries des Gobelins. L’enceinte des Fermiers généraux est à une centaine de mètres à l’est. Les derniers vestiges de l’édifice, partiellement détruit en 1806 lors du percement du boulevard Saint-Marcel, disparaissent en 1874. L’église se trouvait dans un îlot délimité par ce boulevard, l’avenue des Gobelins, la rue de la Reine Blanche et la rue Michel Peter. Au début de la Révolution, le faubourg Saint-Marcel, étudié par Haim Burstin dans un ouvrage qui a fait date, concentre 11 % de la population mais 23 % des pauvres de la ville. Les ouvriers du quartier jouent un rôle moteur lors de la journée du 10 août 1792 (Burstin, 2005). Une « congregatio » (communauté de clercs) dessert l’église, lieu de pèlerinage fréquenté, au début du IXe siècle. Le terme « chanoine » n’est utilisé qu’à partir du XIIe siècle.
En 1790, le chapitre est constitué de quinze chanoines, sous l’autorité de leur doyen, Anne Léon Pheilippes. Les canonicats sont à la nomination de l’archevêque de Paris. Le premier des chapelains (dix-sept selon l’abbé Expilly) est curé de Saint-Martin-du-Cloître-Saint-Marcel, le second de Saint-Hippolyte, deux églises paroissiales du voisinage. Les revenus proviennent de maisons en location dans et hors du cloître, de dîmes et de terres affermées, de droits seigneuriaux et surtout (plus du tiers) de rentes sur le roi, le clergé et différents corps. Dans une déclaration du 24 décembre, les chanoines disent ressentir « avec la plus vive douleur » la suppression du chapitre. Celui-ci, « composé actuellement de vieillards, […] étoit la retraite ordinaire des vieux ouvriers de l’Évangile [dont] plus de la moitié ont été curés ». Après avoir passé leur vie à « faire connoître Jésus Christ », à maintenir la piété et les bonnes mœurs et à rendre des « services aussi sérieux qu’utils », ils estiment avoir bien mérité de la patrie et se désolent de se retrouver « sans azile assuré et sans temple ». Les citoyens du faubourg les soutiennent, affirment-ils. Il est vrai qu’en 1789 ils avaient fait célébrer une messe à la mémoire des victimes du 14 Juillet et avaient accepté de bénir les drapeaux du bataillon local de la garde nationale.
La déclaration des charges révèle que le chapitre verse chaque année 600 livres « à Mrs les choristes ». Il s’agit des « six séminaristes chargés de remplir tous les jours deux à deux la fonction de choristes à chaque office canonial », explique le supérieur du séminaire Saint-Marcel, qui jouxte la collégiale, dans un rapport du 27 février 1790. Fondé en 1685, cet établissement dépendait à l’origine administrativement du séminaire Saint-Louis, rue d’Enfer, mais passa sous l’autorité du chapitre vers la fin du règne de Louis XIV. Outre les appointements des choristes, le chapitre prend à son compte les frais de culte et les honoraires du supérieur (600 livres), l’abbé Charles Auguste BUÉE, prêtre du diocèse de Paris, licencié en théologie, qui exerce à la collégiale la fonction de vicaire de chœur, c’est-à-dire de « premier des choristes » (qui sont donc sept). Il gère lui-même le temporel d’une maison « extrêmement pauvre » et endettée, destinée à former « des sujets [...] qui se disposent au ministère de la campagne », que l’archevêque l’a chargé de relever en 1785. Par sa constitution, ajoute-t-il, le séminaire « n’a point d’autre chapelle que l’église de St-Marcel ». Les choristes sont nommément cités lors du chapitre général qui a lieu chaque année fin juin. Ces jeunes clercs ne demeurant généralement que quelques mois au séminaire, la composition du groupe varie d’une année à l’autre. Le 25 juin 1790, les six choristes ou vicaires en activité sont Pierre Hyacinthe VARIN, Jacques DELAVAIVRE, Pierre RICHEBOURG, Augustin GOURDAN, Antoine Robert Polycarpe DELAPLACE et Germain Christophe BINANT. D’octobre 1786 à juillet 1787, Jean Louis BERTIN réside au séminaire et fait partie des choristes de la collégiale. Il ne deviendra pas prêtre mais sera reçu machicot (chantre ou musicien) à Notre-Dame de Paris, avant d’entrer à l’Opéra en 1792. La présence d’un pupitre et de deux livres de plain-chant dans la « salle d’exercices » du séminaire témoigne de l’importance du chant dans la formation des clercs, mais ce n’est pas propre à Saint-Marcel. Le procès-verbal de fermeture du chapitre fait par ailleurs mention, dans le sanctuaire, de deux « lutrins de chantres » et d’une banquette pour les choristes formant coffre, couverte de tapisserie.
Dans ce même procès-verbal, les chanoines recommandent à la municipalité (chargée, à Paris, de se prononcer sur les demandes de pension ou de gratification des ex-employés des chapitres) « les enfants de chœur au nombre de quatre, [qui] appartiennent tous à de pauvres familles du quartier ». Les quatre derniers connus assistent au chapitre général du 25 juin 1790 : Abraham Marie RUHIER, Jean François MASSON, Jean Charles Marie DUSAUTOIR et Jean-Baptiste COQUEL. Les enfants de chœur touchent 108 livres par an pour leurs gages et assistances aux matines, indique le compte de la grand’chambre de 1777. La compagnie fournit aussi à chaque enfant deux paires de souliers (28 livres pour huit paires) et deux paires de bas (à partir de 1783). Le sieur Moreau, chirurgien des Gobelins, perçoit 6 livres pour raser la tête des enfants de chœur. Au terme de leur service, ils obtiennent une gratification dont le montant varie en fonction du temps passé au service de la compagnie. Entré le 12 octobre 1767 et sorti le 24 mai 1773, Pierre Marie MONNOT reçoit 60 livres. Resté un peu moins de quatre ans, Jean Adrien GILBERT est congédié en 1774 à cause de la perte de sa vue, nanti d’une récompense de 48 livres. La documentation est muette sur leur lieu de résidence et le terme « maîtrise » n’apparaît nulle part.
Il fallait cependant quelqu’un pour assurer leur éducation. La tâche a longtemps été confiée à un choriste, une solution économique pour le chapitre qui se contentait de verser une gratification à l’individu missionné pour cela : en 1777, Nicolas WATBLED (à Saint-Honoré en 1790) touche 50 livres « pour le soin qu’il a pris des enfants de chœur ». Le dernier clerc à avoir exercé la fonction de maître des enfants de chœur est Charlemagne LEFEBVRE, présent au chapitre général du 25 juin 1784. Les choristes étant des séminaristes voués à partir au bout de quelques mois, ce système ne pouvait donner pleine satisfaction. Vers 1784, le chapitre désigne son serpent, Pierre Nicolas RANÇON, un tapissier de la manufacture des Gobelins, pour prendre soin d’eux. En 1790, une somme de 460 livres est allouée à l’entretien des enfants, incluant leurs gages. Les chanoines sont satisfaits de leur employé puisqu’ils le recommandent également à la municipalité.
Il existe un orgue à Saint-Marcel au milieu du XVIIe siècle : Jean PINGAN est aux claviers en 1655. L’instrument n’est mentionné qu’une fois dans le dernier registre capitulaire de Saint-Marcel : le 6 février 1775, la compagnie nomme le sieur « d’Alery [...] pour avoir soin de l’orgue et y faire les réparations qui pourraient devenir nécessaires » (Pierre DALLERY). Il avait déjà été remis en état en 1767, révèlent les comptes de la grand’chambre : le facteur ANGOT avait alors perçu 100 livres pour son intervention. La même année (ce n’est sans doute pas un hasard), Claude Denis DUCHESNE est engagé comme organiste. Sa rémunération modeste (60 livres par an) prouve que l’usage de l’orgue n’est pas quotidien. De fait, il cumule plusieurs tribunes. Après sa mort en 1787, il est probablement remplacé par Armand Étienne DESQUINEMARE. Une chose est sûre : en 1790, l’orgue de la collégiale est toujours entretenu (15 livres au facteur, 12 livres au souffleur), donc toujours fonctionnel. Le procès-verbal de décembre mentionne sous le n° 23 un « buffet d’orgues avec montre et plan sur un châssis en chêne avec deux soufflets ».
••• La collégiale Saint-Honoré, l’un des principaux lieux de formation musicale à Paris
En 1204, un couple de riches bourgeois offre douze arpents de terre afin de faire construire une église dédiée à saint Honoré, un évêque d’Amiens du VIe siècle. Dès sa consécration en 1208, elle est dotée d’un collège de chanoines. Dans un premier temps, la collation des prébendes est alternative entre l’évêque de Paris et le chapitre de Saint-Germain-l’Auxerrois. Un arrangement de 1565 établit que l’évêque conférera les prébendes dont les titulaires siègent du côté droit du chœur, le chapitre celles dont les titulaires siègent à gauche. L’archevêque reste seul collateur après la réunion du chapitre de Saint-Germain-l’Auxerrois à Notre-Dame. La situation évolue cependant dans les années qui suivent, puisque la France ecclésiastique de 1768 indique que trois canonicats sur douze sont à la nomination de « différents particuliers » (en fait des chanoines de la métropole). L’église se trouvait à l’est du Palais Royal, rue Saint-Honoré, entre les rues Baillif (aujourd’hui des Bons-Enfants) et Croix-des-Petits-Champs. Vendue comme bien national en 1792 à un groupe d’investisseurs, elle fut immédiatement démolie et remplacée par des immeubles de rapport.
Saint-Honoré est en 1790 la plus riche des collégiales parisiennes, essentiellement grâce aux loyers des maisons et terrains que le chapitre possède dans la capitale. La déclaration du 25 février 1790 indique que « les bâtiments de l’intérieur du grand et petit cloître, à l’exception des appartements du grand escalier du petit cloître […] sont divisés depuis un tems immémorial pour former douze maisons canoniales pour chacun de MM. les douze chantre et chanoines, et deux pour MM. les chapelains titulaires », mais ces demeures, pour la plupart, sont mises en location. Dans la rue Baillif, au nord de la rue Montesquieu, ouverte en 1802, se dresse la chapelle Sainte-Claire, fréquentée par les élèves du collège des Bons-Enfants. Au-dessus de l’édifice sont aménagés des appartements destinés aux sacristains, vicaires et officiers de chœur de la collégiale, nous apprend également la déclaration.
Le chapitre emploie quatre vicaires de chœur ou chantres ecclésiastiques, qui touchent à l’année 930 livres d’appointements, plus 216 livres (1780) pour assistance aux offices. Leur présence y est en effet jugée indispensable. Le 15 juillet 1782, les chanoines les informent qu’ils seront mis à l’amende s’ils arrivent en retard : 40 sols pour les matines, 20 pour les petites heures. En période pascale, ces chantres jouent un rôle éminent dans les cérémonies : le chapitre leur demande de chanter la Passion à la messe du dimanche des Rameaux et à l’office du matin du Vendredi saint et l’Exultet à l’office de la nuit du jour de Pâques. Le chapitre attend par conséquent d’eux qu’ils maîtrisent parfaitement le chant. Le 11 décembre 1776, Philippe Guillaume L’ÉCOUFLET est nommé vicaire de chœur « sous la condition touttefois de prendre un maître de chant pendant six mois, tant pour s’affirmer dans la science du chant que pour donner à sa voix le goût et l’harmonie dont elle est susceptible ». En 1773, René LONGUET démissionne car il se dit tourmenté de douleurs de poitrine qu’il attribue au chant. Parallèlement, les vicaires de chœur acquittent un certain nombre de messes. Après une absence pour cause de maladie, ils obtiennent toujours d’être payés pour celles qu’ils n’ont pu célébrer. Les chanoines, globalement satisfaits d’eux, les augmentent à deux reprises, en 1781 puis en 1786. En 1790, trois vicaires de chœur les servent encore : Nicolas WATBLED, Désiré Nicolas GODEAU et Henri Joseph Edme BURAT. La quatrième place a été volontairement laissée sans titulaire après le départ de Jacques Antoine VANTHIER en octobre 1789.
Le chant est aussi soutenu par quatre laïcs, appelés chapiers dans les actes capitulaires. En 1790, Jean PINSON, Jean François GILLET et Jean Alexis POUTREL, premier, deuxième et troisième chapiers, touchent respectivement 1 100, 1 010 livres et 1 000 livres par an, honoraires qui comprennent le logement. POUTREL est sermonné par le chapitre en 1785 car il ne fournit pas assez d’efforts pour progresser dans le chant et parce qu’il accumule les dettes. La quatrième place, occupée par Alexis HANGARD jusqu’à sa mort fin 1789, n’a pas été pourvue. Certains meubles inventoriés dans l’église à la requête des autorités municipales mettent en évidence le rôle joué par ces choristes dans les cérémonies. Dans le chœur, par exemple, on relève, à côté d’un pupitre en fer, « un dessus de banquette et trois petits de siège à l’usage des chantres en panne violette avec galons d’or faux, ladite banquette et les trois sièges en menuiserie de chêne ».
Deux serpents complètent l’effectif du bas-chœur. Pierre Antoine BARDIN et Charles Abraham GAUTIER sont des professionnels chevronnés. Le premier, âgé d’environ 35 ans en 1790, a débuté vers 16 ans à l’église paroissiale Saint-Jacques-de-la-Boucherie, où il a été reçu à l’issue d’un concours arbitré par les meilleurs spécialistes du serpent. Le second, ancien employé de la paroisse Saint-Nicolas-des-Champs et de la collégiale Saint-Louis-du-Louvre, avait des compétences reconnues dans le domaine de la facture du serpent. Le salaire de BARDIN s’élève à 800 livres, celui de son collègue à 700 livres.
La collégiale Saint-Honoré possède déjà un orgue au XVIIe siècle, dont on ignore l’origine. En 1648, le chapitre signe un marché avec le facteur Guy JOLLY, qui s’oblige à le déplacer et à le remettre en état pour la somme de 800 livres. Des artistes de renom ont occupé la tribune sous le règne de Louis XIV : Nicolas GIGAULT de 1646 à 1652, Robert CAMBERT de 1652 à 1674, Louis MARCHAND de 1703 à 1707, Pierre FOUCQUET en 1707-1708, Charles PIROYE de 1708 à 1712. Pierre Claude FOUCQUET, fils de Pierre, en est le titulaire de 1712 à sa mort en 1772. Diminué par l’âge, il obtient la survivance pour son fils Louis Marc en 1765 et c’est probablement ce dernier qui prend alors le relais de façon officieuse. Louis Marc FOUCQUET cède sa place en 1780 à Éloi Nicolas Marie MIROIR (dit l’aîné), un organiste de 34 ans originaire de Montreuil-sur-Mer, installé dans la capitale depuis 1768, dont le style empreint de gaieté et de légèreté éblouit déjà le public. Le 4 janvier 1786, les chanoines augmentent ses appointements, qui passent de 300 à 350 livres, pour lui « témoigner le cas que la compagnie fait de son talent », mais MIROIR, qui cumule les tribunes et se fait souvent suppléer, a dû au préalable promettre de toucher lui-même l’instrument dans les grandes occasions (« les jours [...] qui lui auront été indiqués par Mr le Chanoine intendant de la sacristie »). L’organiste utilise un vieux livre d’orgue que l’ancien enfant de chœur Nicolas PRÉVOST a « copié et remis en ordre » en 1785. Le buffet d’orgue est ainsi décrit en 1790 : « Un buffet d’orgue en deux parties avec ses boiseries sculptées et peintes en jaune avec quatre soufflets, leurs supports et montants de der, deux bancs de bois dont un couvert en tapisserie ». François Henry CLICQUOT perçoit 100 livres par an pour entretenir l’instrument.
Le chapitre consacre une part conséquente de ses dépenses à sa maîtrise : 4 098 livres par an, dont 2 548 livres au maître pour la nourriture et l’éducation de six enfants de chœur. L’immeuble accueillant l’école de chant, « ayant son entrée par le cloître Saint-Honoré », comporte au rez-de-chaussée une vaste pièce nommée classe et dortoir de la maîtrise, au premier étage une cuisine et les chambres du maître et de la gouvernante. En 1786, le maître, invoquant la hausse du prix des denrées alimentaires, a obtenu que le loyer (400 livres à l’abbé de Bermondet) soit pris en charge par le chapitre. La pièce du bas est équipée d’un poêle, de six lits à roulettes et de six petites armoires où les enfants rangent leurs effets personnels. Une grande armoire contient le linge de maison (draps, nappes, torchons…) et les habits liturgiques des enfants (aubes, soutanes de drap rouge, camails et manteaux de drap noir). Une imposante table de sapin garnie de six tiroirs sert à la fois aux repas et au travail. Un règlement de 1776 dû à l’abbé Hérissant, ex-intendant de la maîtrise, détaille l’emploi du temps des enfants : lever entre le premier et le second coup de matines, prière du matin, office de matines, (petit-)déjeuner, révision des versets à chanter « tant à la messe qu’aux petites heures et aux obits », messe, apprentissage du cérémonial et leçons de chant jusqu’au dîner (déjeuner), dîner avec le maître, récréation (trois quarts d’heure), révision des versets de l’après-midi, office de vêpres, collège jusqu’à 17h30, révision des versets du lendemain, souper à 19h30, récréation, prière du soir vers 20h45 et coucher. L’originalité réside ici dans le partage des tâches entre la maîtrise et le collège des Bons-Enfants, réuni au chapitre depuis 1602, qui assure la partie « humanités » de la formation. Cet arrangement explique pourquoi les chanoines n’emploient pas de sous-maître ou de maître de grammaire. En 1790, le maître utilise, pour ses leçons, des « livres de musique » (nombre non précisé), un Solfège d’Italie et une Méthode de BORDIER. Si l’encadrement est strict, on ne peut parler d’une éducation « à la dure » : le règlement recommande au maître « de mettre toujours beaucoup de douceur et de bonté dans tous les avis, réprimandes ou corrections qu’il fera à ses enfants [et] de n’en venir jamais aux corrections rigoureuses qu’à la dernière extrémité, et après avoir tenté tous les moyens qu’il est possible d’employer pour les attacher à leur[s] devoirs et les y rendre fidels ».
Les enfants de chœur de Saint-Honoré, parisiens pour la plupart, sont admis sur concours à un âge compris entre 7 et 9 ans. Les parents doivent délivrer à leur garçon un petit trousseau et ont le droit de lui rendre visite les dimanches et jours de fête en fin de journée et même de faire une promenade avec lui si l’intendant et le maître donnent leur permission. La durée du séjour à la maîtrise est ordinairement de huit ou neuf ans : l’enfant sort vers l’âge de 16 ans, généralement pour entrer en apprentissage. Le temps de présence le plus long relevé après 1771 est celui de François GEORGE, sorti en 1775 : 9 ans et demi. L’enfant sur le départ touche une gratification, calculée sur la base de 100 livres par an depuis le 3 juillet 1776 (85 livres auparavant). Claude LE MAURE obtient par exemple en 1784 750 livres pour 7 ans et demi de service, somme remise à l’intendant de la maîtrise pour le placer en apprentissage (est-il orphelin ?). Le chapitre exclut parfois des enfants pour des problèmes de comportement ou de santé. Deux pensionnaires, Joseph Anne COLLOT et Pierre SAMÈDE, sont renvoyés en 1774 et 1781 à cause de leurs parents, qui ont tenté de les faire recevoir à la maîtrise de la cathédrale Notre-Dame après leur admission à Saint-Honoré.
En 1790, il ne reste plus que quatre enfants à la maîtrise : René Pierre Joseph ALBERT, Arnoul Joseph CARRIER, Claude Marie SAINT-PAUL et François Louis KERCHOVE. Le dernier maître de musique et des enfants de chœur de la collégiale n’est autre que son premier serpent, Pierre Antoine BARDIN, reçu en cette double fonction en 1780. Le choix par le chapitre d’un serpent pour diriger sa maîtrise n’était pas chose nouvelle. Frédéric Hubert PAULIN, admis comme serpent en 1706, fut élu maître de musique et des enfants de chœur de la compagnie en 1715 et le demeura jusqu’à sa mort en 1761. Antoine François CHARRIÈRE, son successeur, exerça également les deux fonctions. Tous trois donnaient parallèlement des leçons de musique à des jeunes gens de bonne famille et PAULIN s’était en outre fait connaître par une série de divertissements donnés avec un certain succès au Concert spirituel en 1728 et 1729. Ces maîtres, il faut le noter, étaient tous des laïcs.
••• La collégiale Sainte-Opportune : une organiste aux claviers en 1790
Plan de Sainte-Opportune, XVIIIe siècle (source gallica.bnf.fr / BnF, Estampes et photographie, RESERVE FOL-VE-53 H)
La collégiale Sainte-Opportune était située au sud des Halles, entre la rue Sainte-Opportune (n° 2 actuel) et la place du même nom (n° 8 actuel). Vendue comme bien national en 1792, elle fut démolie pour servir de carrière de pierres. Selon la tradition, elle aurait été fondée à la suite d’une donation du roi Louis II le Bègue vers 877-879 afin d’offrir un écrin aux reliques de sainte Opportune (une abbesse normande morte en odeur de sainteté au siècle précédent), apportées à Paris par Hildebrand, évêque de Sées. Cependant, l’historien Michel Guillot estime que le chapitre pourrait avoir été institué plus tardivement, au Xe siècle (Kocevar, 1996). De quatre chanoines à l’origine, on passe à huit en 1253 et l’effectif ne varie plus par la suite. Le chapitre de Saint-Germain-l’Auxerrois, sur le territoire duquel est bâtie la collégiale, est le collateur des prébendes jusqu’à son union avec le chapitre de Notre-Dame. Ce dernier cède ce droit à l’archevêque en 1749. L’église, telle qu’on pouvait la contempler au début de la Révolution, était un édifice des XIIIe-XIVe siècles. Les fleurs de lys sculptées sur les tours rappelaient qu’elle était de fondation royale et qu’elle jouissait du droit de committimus.
Le seul dignitaire est le chevecier ou chefcier : il préside au chœur et exerce la fonction de curé. Depuis 1225, en effet, l’église est le siège d’une petite paroisse regroupant de trente à quarante maisons. Entre 1683 et 1791, le service est assuré en la chapelle Saint-Louis, du côté méridional de la nef. C’est là qu’on pouvait admirer une Vierge de douleur de Philippe de Champaigne, aujourd’hui conservée au musée du Louvre. Antoine Claude Pion, chefcier-curé dans les années qui précèdent la Révolution, exerce en même temps la responsabilité de procureur (ou receveur) de la compagnie, chargé à ce titre de verser aux chantres et enfants de chœur les gratifications que les chanoines veulent bien leur accorder. Le chapitre ne possède aucun meuble : tout ce qui sert au culte est fourni par la fabrique en vertu « d’anciens arrangements ». Il existe à Sainte-Opportune un chanoine semi-prébendé, créé « dans des temps reculés où la discipline ecclésiastique était moindre » afin de se substituer aux chanoines absentéistes. Or, il voulut « s’octroyer le titre et siéger dans le chapitre », ce qui entraîna des contestations auxquelles un arrêt contradictoire de 1484 ne put mettre un terme définitif. En 1754, les problèmes de résidence étant réglés, la compagnie entame des démarches pour en obtenir la suppression, en vain. Le 7 août 1784, un arrêt du Parlement défend au sieur Poirot de se qualifier de neuvième chanoine. L’installation de Jérôme Éléonor Lemercier, qui aurait dû se faire en 1785, n’a lieu qu’en 1788 à cause d’une formulation ambiguë contenue dans sa procuration ad resignandum (« canonicat, prébende ou semi-prébende »). Le dernier titulaire, Charles Antoine Eymenier, est en revanche admis sans difficulté. Ce semi-prébendé pourrait avoir eu des fonctions cantorales particulières.
Les chanoines sont assistés à l’office par des vicaires. Entrent dans cette catégorie des ecclésiastiques qualifiés dans les délibérations de vicaires de chœur (quatre ?). Deux sont à coup sûr actifs en 1790 : Edme Pierre GENET, le diacre d’office, et René MAZIÈRES, le maître des enfants de chœur. Un autre pourrait l’être encore : François Louis BOUCHONY. Le dernier registre capitulaire ne fournit aucun indice sur les tâches leur incombant dans le domaine du chant. On sait seulement que deux d’entre eux doivent porter les reliques de Sainte Opportune sur un brancard lors des processions, « ainsi qu’il s’est pratiqué de temps immémorial » (14 janvier 1788). En 1790, MAZIÈRES adresse une supplique au président de l’Assemblée nationale au nom de tous les vicaires des chapitres de Paris, en tout vingt personnes d’après lui. Il résume ainsi leurs fonctions : « Faire l’office des chanoines ». Craignant les réformes à venir, il demande qu’un traitement leur soit assuré, en insistant sur ce qui les distingue des employés laïcs, qui peuvent plus facilement qu’eux retrouver un emploi. Le chapitre salarie aussi quatre « vicaires choristes ». Chacun perçoit 449 livres en 1785, dont 300 de gages, augmentés de 50 livres l’année suivante, ce qui suffit à peine pour vivre à Paris dans les années prérévolutionnaires. Alexandre André JOANNÈS, premier choriste, exerce en parallèle le métier d’orfèvre, tandis que Théodore François GOSSE, troisième choriste, est peintre décorateur (ou encore vernisseur). Le quatrième, Jean-Baptiste PAYRAL, n’a peut-être pas besoin d’un second emploi car la fabrique le rétribue comme choriste, en association avec Dominique PERDU qui, de son côté, ne sert pas le chapitre. Le marguillier de la paroisse verse à chacun 200 livres par an d’après le compte de 1787. On ignore si le deuxième choriste, Grégoire HERNIS, dispose d’autres sources de revenus.
Le serpent de la collégiale, Robert DUBRAY, a été engagé en 1782. Il travaille à la fois pour le chapitre (124 livres par an au lieu de 100 à compter du 27 février 1786) et la fabrique paroissiale (100 livres par an en 1787). Les vicaires choristes et le serpent peuvent faire la demande d’un logement de fonction dans les étages supérieurs (quatrième ou cinquième) d’un immeuble accolé à l’église appelé « maison canoniale » (n° 2 sur le plan), dont les chanoines occupent les niveaux inférieurs. Les loyers sont avantageux, puisque les locataires ne s’acquittent que de 24 à 30 livres à l’année, prélevées sur leurs gages. En 1785, seuls GOSSE et DUBRAY ont saisi cette option. Les vicaires choristes obtiennent régulièrement des gratifications. Pourtant, il leur arrive d’être en retard à l’office ou absents sans motif valable. C’est sans doute pour cette raison que le 10 juillet 1780, les chanoines décident qu’il « sera fait une table d’assistance particulière pour MM. les vicaires prêtres et MM. les vicaires choristes, dans chacune desquelles ils seront pointés exactement ». Le chapitre stipendie encore un carillonneur, Jean-Baptiste LEMAÎTRE (16 livres par an d’après le compte de 1785) relevant cependant juridiquement de la fabrique, qui l’a recruté en 1778 et lui octroie un salaire de 40 livres par an.
Comme à Saint-Marcel, il n’existe pas de maîtrise à Sainte-Opportune, au sens d’école de musique. Une délibération du 3 février 1785, qui ordonne que le produit des pointes sera mis en réserve pour être employé à la fondation d’une maîtrise des enfants de chœur, l’établit formellement. L’éducation musicale de ces derniers est donc très superficielle : le démontre une décision du 26 avril 1785 autorisant le chefcier à verser 4 livres par mois au père de GRANCHER, l’un des enfants, pour lui faire apprendre la musique, et ce en avance sur la gratification attribuée aux enfants de chœur lorsqu’ils partent, calculée sur le pied de 50 livres par an. Les enfants résident en internat, comme l’indique une délibération du 5 septembre 1785 qui permet au chefcier de faire réparer leur logement et leurs lits. Le 1er septembre 1788, le chapitre désigne une femme dont le nom n’est pas précisé pour donner « tous ses soins aux enfants de chœur et particulièrement pour veiller à leur coucher », moyennant 8 francs par mois. Est-ce une première étape vers la création d’une maîtrise ? Si tel est le cas, les événements de 1789-1790 gèleront le projet. En 1785, les frais relatifs aux enfants sont détaillés dans le chapitre « dépenses ordinaires et extraordinaires » des comptes. Le procureur a payé 173 livres 5 sols pour le pain consommé par les enfants (37°), 65 livres pour leurs bas et calottes (38°), 63 livres pour leurs souliers (39°), 43 livres 10 sols pour le raccommodage de leurs soutanes (40°), 17 livres 16 sols pour la réfection de leurs paillasses et matelas (41°), 9 livres pour le dégraissage des carreaux de leur logement (42°) et 15 livres au perruquier qui les a rasés (44°). Le nombre habituel d’enfants de chœur à Sainte-Opportune est de quatre. Cependant, le 17 novembre 1788, le chapitre se propose d’accueillir deux enfants surnuméraires. Effectivement, parmi les effets destinés au culte inventoriés en 1790, on relève six petits escabeaux d’enfants de chœur. Seuls les quatre titulaires obtiennent une gratification en 1792 : les frères Louis Étienne et Pierre Victor LEGRIS, Pierre Dominique DUBRAY (fils du serpent) et Jean Louis GOGLET, qui était l’un des surnuméraires en 1788. Ces enfants sont aussi au service de la fabrique qui, en 1787, leur verse 60 livres à se partager et procure à chacun une nouvelle paire de souliers. Pour leur entretien, le curé-chefcier touche du marguillier la somme de 45 livres, à laquelle il faut ajouter celle de 95 livres payées à un boulanger pour fourniture de pain.
La fabrique paroissiale emploie un organiste dès 1476, mais on ne sait rien sur l’instrument dont il a la responsabilité. En 1535-1536, un nouvel orgue réalisé par Pasquier BAULLERY est érigé sur une tribune de type « nid d’hirondelle » du côté sud de la nef. Il s’agit d’un huit pieds en montre comportant dix jeux réels, à clavier unique de 42 touches et pédalier. En décembre 1695, les facteurs Antoine MARTIN et Pierre François DESLANDES sont priés de concevoir un instrument plus adapté au style de l’époque, qui trônera au-dessus du portail principal. Pour la construction du buffet, les administrateurs de la paroisse font appel à Michel Pellet et pour la tribune à Jean Gauffre. Une première campagne de travaux s’étend de début 1696 à avril 1698. Nicolas LEBÈGUE, organiste de Saint-Merry et de la Chapelle royale, et Alexandre THIERRY, facteur d’orgues, qui expertisent l’orgue le 1er mai 1698, recommandent diverses améliorations. Les opérations ne s’achèvent qu’en 1701 : en tout, la fabrique aura déboursé 2 125 livres. L’orgue, de vingt-quatre jeux répartis sur trois grands manuels (grand orgue, positif de dos, écho), doté d’un pédalier étendu (trente-trois notes), n’a plus rien à voir avec celui de la Renaissance. Le buffet à trois tourelles et la tribune, « avec ses colonnes et ses lignes néo-classicissantes [sont] dans le plus pur style louis-quatorzien » (Kocevar, 1996). Au XVIIIe siècle, Claude FERRAND puis son fils Claude Denis assurent l’entretien de l’instrument (40 livres par an d’après le compte de 1787).
Les organistes sont bien connus à partir du milieu du XVIIe siècle : à Olivier CARON (1647-1667) et à son fils Nicolas (1667-1695), succède Jean LANDRIN, qui délaisse Sainte-Opportune pour la Chapelle royale en 1721. Joachim DEDOUÉ occupe la tribune de 1721 à 1732, remplacé par Pierre FÉVRIER, qui sera renvoyé en 1740. Nicolas Hubert PAULIN, fils du maître des enfants de chœur de la collégiale Saint-Honoré Frédéric Hubert PAULIN, ne fait qu’un passage-éclair à la collégiale (1741-1742), préférant se fixer à Versailles où il se fait nommer organiste de la paroisse Notre-Dame. Charles NOBLET, reçu en 1743, exerce jusqu’à sa mort en 1769. Il cumule les postes, puisqu’il est en même temps claveciniste à l’Académie royale de Musique et organiste de la paroisse Sainte-Madeleine-en-la-Cité et du couvent des Mathurins. Compositeur de pièces de clavecin et de cantates, cet artiste fut salué de son vivant pour sa dextérité. Sa sœur Marie Geneviève Nicole NOBLET prend la suite et demeure active jusqu’à la Révolution, même si elle confie souvent les claviers, à partir de 1778, à son survivancier Adrien Louis de Gonzague THIÉBAUT. Les gages des organistes de la paroisse sont peu élevés : 45 livres par an à l’époque de DEDOUÉ. Charles NOBLET perçoit 130 livres en fin de carrière. En 1787, la somme n’a pas été augmentée. Les délibérations du chapitre évoquent rarement l’organiste. De 1782 à la Révolution, il accorde à la demoiselle NOBLET, qui tire le plus gros de ses revenus des leçons de clavecin qu’elle donne en ville, une gratification annuelle de 60 livres.
Selon le calendrier liturgique fixé au XVIIe siècle, l’organiste touche l’orgue aux offices canoniaux à 104 reprises dans l’année. Sa présence le dimanche n’est requise qu’une fois par mois, chaque premier dimanche. Pour la paroisse, il est sollicité plus de 160 fois, et cela ne comprend pas « l’extraordinaire », qui tient une place importante. Signalons deux moments forts de l’année, marqués par le déploiement d’un faste particulier : la fête de sainte Opportune le 22 avril et la Fête-Dieu en mai. Le chapitre convie six chantres supplémentaires à la première, qui perçoivent chacun 6 livres pour assister à tous les offices (décision du 23 avril 1781). L’organiste touche l’orgue la veille au salut et le jour de la fête à quatre reprises (matines, messe, vêpres et salut). Douze choristes ou thuriféraires externes participent à la seconde, auxquels la compagnie verse 24 livres, soit 2 par personne (1785). L’organiste monte à la tribune tous les jours de l’octave de la Fête-Dieu pour la messe, les vêpres et le salut et le jour du Saint-Sacrement également pour les matines, la messe et les vêpres.
III - Les « Filles de Notre-Dame »
Les relations entre le chapitre de Notre-Dame de Paris et ses quatre églises sujettes sont marquées, dans la seconde moitié du XVIIIe siècle, par des tensions qui culminent dans les années 1750-1760. Tout commence par une ordonnance des chanoines métropolitains du 9 mars 1751, dont le ton impérieux et le vocabulaire employé (« inférieurs », « subordination »...) blessent l’amour-propre des quatre compagnies. Surtout, on leur ordonne de se placer dans les processions communes ou lors des services au chœur d’églises étrangères, entre les chapelains et les machicots de Notre-Dame. Dans ce dernier cas, ils devront siéger dans les basses stalles voire sur des bancs « de manière que les bénéficiers, chantres & enfants de chœur de l’Église de Paris, ne soient aucunement empêchés d’approcher du lutrin & d’y chanter, selon son rang & sa fonction » (Arrest du parlement concernant la Jurisdiction du Chapitre de l’Église de Paris, 1763). Les chapitres réagissent en lançant une procédure d’appel comme d’abus, en vain puisqu’ils sont finalement condamnés à payer des amendes et une partie des frais de justice par l’arrêt du 6 septembre 1762. Leur statut de dépendance totale est explicitement réaffirmé, et défense est même faite aux chanoines « desdites quatre Églises de prendre ladite qualité & de s’intituler chapitre capitulairement assemblé, sauf à eux de s’assembler autrement que par forme capitulaire pour délibérer sur leurs affaires temporelles », avec interdiction de réglementer le service divin ou d’exercer la discipline. Dans ces domaines, tout doit passer sous les fourches caudines d’un chapitre cathédral qui semble dénier à ses « filles » l’appellation même de chapitre.
••• Saint-Étienne-des-Grès, un établissement qui s’ouvre à la musique sur le tard
Vue extérieure de Saint-Étienne-des-Grès, dans Jacques-Maximilien Blins de Saint-Victor, Tableau historique et pittoresque de Paris, t. 3, Paris, 1808-1809 (source gallica.bnf.fr / BnF, 4-Z LE SENNE-1030 3)
L’église collégiale Saint-Étienne-des-Grès se trouvait avant sa démolition, en 1792, au croisement de la rue Saint-Jacques et de l’actuelle rue Cujas, rive gauche. Ce petit édifice était situé presque en face du couvent des Jacobins de la rue Saint-Jacques et à peu de distance des églises Saint-Étienne-du-Mont et Sainte-Geneviève. L’origine du surnom « des Grès » reste mystérieuse. On évoque soit des degrés qu’il fallait monter pour entrer dans l’édifice, soit des bornes en grès délimitant des censives différentes, soit le terme médiéval « grès » utilisé pour désigner une petite colline. On trouve parfois aussi « Saint-Étienne des Grecs » en raison de l’opinion répandue d’une prétendue mission de saint Denis, dépêché en Gaule avec ses compagnons, par le pape Clément depuis Athènes. « Le flambeau de la critique a dissipé ces ténèbres d’ignorance », se réjouit Nicolas François Jacquemart (1792) à l’encontre de ces prétendues origines grecques. Pourtant, lui-même justifie l’existence de l’établissement avant le VIIe siècle en s’appuyant sur une source également douteuse, le testament d’une certaine Ermintrude, antérieur au règne de Dagobert. La mention la plus ancienne de cette église se trouve dans une charte de 995 (Plongeron, 1987). Les archives conservées les plus anciennes sont des comptes de 1187-1204. C’est au XIIIe siècle que des prébendes ont été établies. À la même époque, l’édifice prend progressivement l’aspect qu’on lui connaîtra ultérieurement. Le portail, lui, date du XVe siècle. Une chapelle accueillait la statue de Notre-Dame de Bonne-Délivrance, objet d’une vénération particulière au XIVe siècle. Lors des Guerres de Religion, elle fut invoquée comme victorieuse de toutes les hérésies. En 1533, une confrérie de la Charité de Notre-Dame de Bonne-Délivrance fut érigée dans l’église. Dotée de nombreuses indulgences, elle comptait des milliers de membres, dont Louis XIII en 1622. Le chapitre connut par la suite des démêlés avec cette puissante confrérie comblée de dons par les papes et les rois, au point que le parlement de Paris finit par la supprimer en 1737. Elle fut toutefois rétablie en 1774.
En 1790, le chapitre est composé de douze chanoines à la collation du chapitre de Notre-Dame de Paris et d’un chefcier, institué en 1251. C’est l’une des collégiales les moins bien dotées de la capitale. En mars 1784, une ordonnance des chanoines de la métropole ordonne des réformes à accomplir, dont la réduction de fondations, afin de combattre le lourd déficit dont elle est accablée : on évoque alors 59 273 livres de dettes. L’essentiel des 13 000 livres de revenus déclarés lors de l’inventaire de 1790 provient de locations immobilières, dont 21 appartements pour la plupart autour du cloître, un étal de boucherie et une échoppe sous le clocher (7 373 livres), des rentes « sur le roi » (1 744 livres) et sur différents particuliers et des rentes foncières (2 875 livres). Les biens de campagne sont presque insignifiants. Les dépenses ne dépassent pas les 10 000 livres dont la moitié concernent l’assistance des chanoines à l’office divin et à « la fondation de l’abbé Mocquet ». L’entretien des bâtiments, gardés par deux portiers, forme à peine le dixième des dépenses.
Les deux inventaires de février et décembre 1790 révèlent une activité cantorale et musicale. Dans le chœur, on énumère un lutrin de bois sculpté, un pupitre pliant en fer pour les chantres auxquels l’une des trois banquettes de panne rouge est réservée, placée devant le lutrin, mais il faut encore distinguer trois sièges de choriste « avec marchepieds, le tout en bois peint en jaune ». À proximité, on relève « deux chandeliers de bois ferrés pour les chantres, avec leurs mouchettes ». Dans le chœur sont déposés les livres liturgiques et de chant, dont huit missels, un martyrologe, un bréviaire en quatre volumes, un rituel, un cérémonial, quatre processionnaux, deux graduels notés dont l’un pour les « féries », trois antiphonaires pour les offices de l’année et un psautier ; certains sont reliés en veau, d’autres en parchemin, le tout « avec attaches garnies en cuivre ». Dans la chapelle de la Vierge se trouve un buffet d’orgue monté à neuf avec ses quatre soufflets.
Le personnel dédié au chant et à la musique de la collégiale est composé de deux chantres, un serpent, quatre enfants de chœur dirigés par leur « préposé », qui est un chanoine, et un organiste. Notons aussi la présence d’un souffleur et d’un carillonneur qui porte le même nom que le serpent. Le chapitre 7 des dépenses du compte de fabrique de 1790 livre les noms de François Michel BIARD et de Jean Jacques GRANDJEAN comme chantres. Tous deux perçoivent 18 livres par mois soit 216 livres par an. Le premier, resté « garçon », d’origine normande, est en fonction depuis au moins un quart de siècle. Le second, natif de Lagny-sur-Marne [Seine-et-Marne], a été reçu en 1785. En août 1783, le chapitre a reconnu « que les gages des chantres n’étoient pas proportionnés à la peine de leur service [et] a arretté qu’à l’avenir on psalmodieroit toutes les matines, exceptées celles des jours solemnels mineurs et au-dessus ». En janvier 1787, le sous-diacre Bernard Moreau est prié « d’être au pulpitre pour modérer le chant », ce qui relève habituellement des attributions d’un maître de musique. Les voix des choristes sont soutenues par le joueur de serpent Louis Nicolas HENIQUE, jeune Parisien de 17 ans, recruté en 1787. Son engagement a été permis par un don de 2 400 livres dû à un anonyme (en réalité un maître des requêtes, Joseph Claude Justin Hénin de Cuvillers), qui servira à constituer une rente. Ses gages s’élèvent à 96 livres annuellement, « aux conditions d’assister à la 2nde grande messe, à la petite heure qui la précède et aux vespres des dimanches et festes solemnelles, aux premières messes des solemnels majeurs et annuels ».
À une date inconnue, la compagnie a dû se résoudre à supprimer ses enfants de chœur, remplacés par des servants de messe (en février 1785, il est distribué « un petit pain à chacun des enfans qui viendront faire les cérémonies les jours de dimanches et festes et qui y auront vacqué le matin et l’après-midi »). La générosité du chevalier Hénin de Cuvillers permet de rétablir quatre enfants de chœur en janvier 1788 grâce à un don de 8 000 livres sous forme d’une fondation. Une somme de 100 livres est prévue « au profit de mr le chanoine qui sera désigné par le fondateur pour leur donner l’instruction nécessaire, à la charge de dire une messe basse le trois février de chaque année, au moyen de quoi lesdits quatre enfans de chœur feront tour à tour les fonctions du serveur actuel des messes, auquel le chapitre donnoit 2 livres par mois. Ledit chapitre aura 56 livres pour leur entretien et il s’oblige à fournir ce qui manque. [Il] n’entend néanmoins [pas] les fournir de bas et de souliers mais il exigera des parens que ces deux articles soient à leur charge ». Par ailleurs, c’est le préposé qui choisira les enfants de chœur et décidera de leur renvoi sauf si les trois quarts des capitulants en décident autrement. Le chapitre confie à Marie Georges François CHARPENTIER la charge de veiller sur les enfants de chœur pour 182 livres par an outre le logement. Chacun perçoit 6 livres par mois. On ne peut nommer ces enfants, mais signalons que le jeune MARTIN est chassé pour insubordination en août 1790.
L’orgue installé dans la chapelle Notre-Dame était en place en l’église Saint-Nicolas-du-Chardonnet avant janvier 1787. Son acquisition a été facilitée par une remise de remboursement d’une somme de 1 500 livres effectuée par les chanoines de Notre-Dame. En février 1787, le facteur parisien Pierre DALLERY, ancien associé de François Henry CLICQUOT, est contacté et le chapitre reconnaît qu’il faudra dépenser 1 200 livres supplémentaires afin de perfectionner l’instrument et le poser. Le devis présenté pour « posage » (avec la balustrade) et augmentation, à peine plus élevé que celui proposant la pose seule, est adopté et signé en mars. Dès le 17 décembre, l’instrument est accessible car une délibération indique que « l’organiste sera prié de toucher après le De profundis du salut ». La réception officielle se déroule le 24 février 1788 en présence de trois sommités de l’orgue, SÉJAN l’aîné, BEAUVARLET-CHARPENTIER et DESPREZ. DALLERY est conservé comme facteur pour l’entretien aux gages de 30 livres, alors qu’il en réclamait 50. L’organiste est le mystérieux CRÉPIN, mentionné dans le registre en février 1787. En 1784, Armand Étienne DESQUINEMARE était encore titulaire de l’orgue précédent. CRÉPIN est tenu de « toucher l’orgue non seulement aux premières vespres mais encore aux matines des fêtes de rite solemnel majeur et au-dessus ». En novembre 1790, peu avant sa suppression, le chapitre lui reproche de manquer « assé souvent de toucher l’orgue les jours auquel il est obligé de le faire » et décide de mettre fin à son engagement au regard de la tournure des événements. L’acquisition d’un nouvel orgue, le recrutement d’un serpent et le retour des enfants de chœur prouvent que le chapitre s’ouvre à la musique à la fin de l’Ancien Régime, dans l’idée, peut-être, d’obtenir plus de visibilité et d’affirmer son existence face aux nombreuses églises de la capitale.
••• Saint-Benoît, la moins bien dotée des collégiales parisiennes
Vue extérieure de Saint-Benoît, dans Jacques-Maximilien Blins de Saint-Victor, Tableau historique et pittoresque de Paris, t. 3, Paris, 1808-1809 (source gallica.bnf.fr / BnF, 4-Z LE SENNE-1030 3)
L’église Saint-Benoît, appelée aussi Saint-Benoît-le-Bétourné (en raison de son plan mal orienté), se situe rue Saint-Jacques, presque face au collège Louis-le-Grand, sur la rive gauche. Le vocable apparaît à la fin du XIIe siècle mais l’église date du VIe siècle : à l’époque, cet établissement de fondation mérovingienne est connu sous l’appellation de Saint-Baque. Le roi Henri Ier la cède à l’évêque de Paris en 1045, mais c’est sans doute le chapitre de Notre-Dame qui a fondé la collégiale peu avant 1171 (Massoni, 2013). En 1205, il en est le supérieur (Plongeron, 1987). L’église métropolitaine donne la collation des canonicats (à l’origine six, possédant des fonds en commun) et exerce la juridiction disciplinaire. Le semi-prébendé en fonction à la fin de l’Ancien Régime correspond à un septième canonicat fondé en 1194, jouissant d’autres ressources. Dès le milieu du XIVe siècle, fonctions collégiales et paroissiales sont séparées, le chapitre ne gardant que les droits du curé primitif. Aux canonicats s’ajoutent six chapellenies fondées au XIIIe siècle en lien avec les besoins du culte, dont deux vicaires de chœur, un diacre et un sous-diacre (Grisel, 1973). La communauté se ferme ensuite. La compagnie impose progressivement sa juridiction aux chapelains, ce qui provoque un conflit avec le chapitre métropolitain, qui le soupçonne de chercher à acquérir son indépendance. Deux arrêts du Parlement, de 1651 et 1686, font triompher l’autorité de Notre-Dame. Les chanoines de Saint-Benoît échouent même à obtenir un doyen. Au XVIIIe siècle, ils entretiennent le chœur, le clocher, les ornements et nomment les gagistes (chantres laïcs), sur lesquels les chapelains se déchargent de certaines tâches contre rémunération. Le curé de la paroisse, réduite à un petit périmètre autour des rues Saint-Jacques et de la Harpe, est présenté par le chapitre, qui en nomme aussi les vicaires. Cela n’empêche pas le curé de batailler contre la compagnie qui a récupéré l’essentiel des revenus tirés du casuel et des fondations. L’édifice, transformé en théâtre (1831) puis en logements (1840), est finalement abattu en 1854 (Grisel, 1973).
La déclaration des biens fournie en mars 1790 précise que le chapitre, composé de dix-huit bénéficiers dont six chanoines, un semi-prébendé et onze chapelains (parmi lesquels se trouve le curé) possède à peine plus de 10 000 livres de revenus provenant surtout de locations de maisons dans la capitale et ses faubourgs, ce qui fait de lui le chapitre le plus pauvre de la capitale. Le montant des charges s’élève à près de 7 000 livres. L’état du mobilier n’est pas précisé dans cette déclaration car il doit appartenir à la fabrique. L’une des demeures qu’il possède sert à loger le semi-prébendé et les dix chapelains de chœur. Les deux maisons théoriquement attribuées aux chantres et aux enfants de chœur sont louées à des particuliers en 1790.
Les trois chapiers ou choristes ne perçoivent pas les mêmes honoraires. Les deux premiers, Nicolas François GOUBET et Jean Joseph BONNOTTE, reçoivent 288 livres par an, le troisième, Pierre Antoine SAURET, 200 livres. Ce dernier, en réalité, n’est qu’un aide de chœur engagé au mois d’avril 1789 en attendant une recrue « dont la taille soit plus haute », en remplacement de Richard César DE GRENTHE, troisième chapier admis un mois plus tôt, mais qui « ne sait pas son chant ». Il leur est versé en outre, ainsi qu’aux enfants de chœur, la somme de 66 livres 10 sols par an pour leur participation aux processions de l’année 1790 à raison de 3 livres 10 sols par procession. Ces chantres sont semble-t-il aussi au service de la paroisse, comme le laisse supposer une délibération de janvier 1777 au sujet du recrutement d’Alexandre DUBOIS. Dans cette église, la rotation des postes est rapide.
Le second choriste, BONNOTTE, occupe la fonction de maître des enfants de chœur depuis septembre 1790, à la suite d’Antoine AUBÉ. Il doit respecter à la lettre un règlement rédigé par le chapitre en 1785 au sujet des tâches du maître et des enfants. Depuis cette époque, les chanoines acceptent un laïc à cette place auparavant détenue par un ecclésiastique, en l’occurrence le sacristain. Il faut noter le renouvellement fréquent des maîtres des enfants de chœur, qui semblent rarement donner satisfaction. En 1782, par exemple, l’abbé PARIS est renvoyé pour avoir fait des dettes et ne pas avoir accompli son devoir avec exactitude. Les enfants de chœur sont au nombre de quatre, mais les registres mentionnent irrégulièrement leur nomination, si bien qu’il est difficile de les identifier au moment de la fermeture de la collégiale. Louis Marcelin LAMEULLE, nommé en octobre 1789, est probablement encore présent. En 1765-1766, l’un des chanoines a consacré des fonds dans son testament afin de permettre de les vêtir et chausser avec soin. En 1779, les comptes de chanoines et chapelains signalent qu’il a été dépensé, pour les quatre enfants, 8 livres pour bas donnés à Pâques, 13 livres pour les souliers et 42 livres pour les camisoles. En 1768, un chapelain a par ailleurs cédé une rente pour fournir à chacun « le Nouveau Testament, le Cathéchisme historique de Montpellier, la Vie des Saints, l’Imitation de Jésus Christ, les livres d’église matin et soir ». Le service est de six années au bout desquelles l’enfant reçoit une gratification de 50 livres. Depuis le printemps 1789, le maître et les enfants sont installés dans une chambre de la maison servant aux chapelains, place du Cloître. Pour cela, il a fallu expulser le locataire qui s’y trouvait. Le terme « maîtrise » n’est pas utilisé dans les sources : la formation musicale des enfants est probablement sommaire.
Lors des cérémonies extraordinaires, le chapitre recrute des chantres externes comme en août 1785, lorsqu’ils vont chanter l’office à Saint-Ouen-sur-Seine dont la compagnie est « curé primitif », ou en avril 1790, pour la fête de la translation de saint Benoît (trois chantres et le serpent). Les livres de chœur (antiphonaire et psautier) viennent alors d’être renouvelés.
L’identité du serpent du chapitre en 1790 reste incertaine. La dernière réception inscrite dans le registre remonte au 3 mai 1785 : il s’agit de François JULIEN, qui était précédemment en poste en l’église paroissiale Saint-Leu-Saint-Gilles. Le 6 août 1781, les marguilliers entendent réparer l’orgue de l’église, sans doute installé dans la nef, preuve qu’il relève de leur juridiction. En cette occasion, ils obtiennent l’autorisation du chapitre de faire placer un orgue portatif dans le chœur, entre l’autel et le lutrin. C’est l’organiste Éloi Nicolas Marie MIROIR, dit l’aîné, titulaire de l’instrument depuis 1775, successeur de Claude Denis DUCHESNE, qui transmet cette demande. Le Journal de Paris annonce, à la date du 20 mars 1789, que la « veille de la Fête de St-Benoît, il y aura Te Deum à 5 heures après-midi en l’Église Collégiale & Paroissiale de St-Benoît. L’Orgue sera touché par M. Miroir, Organiste de cette Église ». Il est encore en fonction au moment de la suppression du chapitre le 24 décembre 1790 et sans doute continue-t-il à travailler pour le compte de la fabrique dans les mois qui suivent. Les chanoines ont participé de loin au « rétablissement de l’orgue » en octroyant une petite gratification aux ouvriers en juillet 1784. François Henry CLICQUOT a effectué ces travaux, après Nicolas SOMER qui était intervenu à plusieurs reprises depuis 1767. Ces deux illustres facteurs s’inscrivent à la suite de tous ceux qui ont augmenté, démonté et remonté le petit orgue construit en 1587 par le Flamand Jan LANGHEDUL : Guy JOLLY en 1655, Pierre CAUCHOIS, Alexandre et Charles THIERRY en 1673 ou encore Jean BESSART en 1687. L’instrument est toujours visible en l’église Saint-Jacques-du-Haut-Pas, où il a été installé en 1793.
••• Saint-Merry, une église où se pressent les amateurs d’orgue
L’église Saint-Merry (ou encore Merri) tire son nom d’un ermite bourguignon mort à Paris en 700, Médéric, dont le corps fut inhumé dans une chapelle appelée Saint-Pierre-des-Bois. Le lieu attira très vite des pèlerins, ce qui incita l’évêque de Paris à faire placer ses ossements dans une châsse en 884. L’église devint collégiale vers 1015 lorsque Renaud de Vendôme, alors évêque, en fit don au chapitre de Notre-Dame qui y délégua sept ecclésiastiques ou chanoines, selon l’historien Henri Sauval (1623-1676). Elle fut érigée en paroisse en 1200. Les chanoines remplirent dans un premier temps les fonctions curiales à tour de rôle, avant de les attribuer au plus ancien d’entre eux. En 1790, c’est le chefcier Louis Esprit Viennet, seul dignitaire du chapitre, qui fait office de curé. Les sept bénéfices sont à la nomination de six chanoines de la cathédrale, précise la France ecclésiastique de 1786.
Cette église, sise au 78, rue Saint-Martin, est la seule collégiale, avec la Sainte-Chapelle, à ne pas avoir été détruite. Elle doit sa survie à la loi du 4 février 1791 relative à la circonscription des paroisses de la ville de Paris, qui l’intègre dans la nouvelle organisation. Fermée en 1793, elle est transformée en fabrique de salpêtre puis remise en 1796 aux théophilanthropes qui lui donnent le nom de Temple de la Réunion. Les catholiques en retrouvent la jouissance en 1803. L’église actuelle, de style gothique flamboyant, a été rebâtie de 1500 à 1565 en lieu et place d’un édifice du IXe siècle. Le clocher, plus tardif, a été achevé en 1612. Le Voyageur à Paris (1788) indique que « la châsse du saint, placée derrière le maître-autel, est soutenue par deux anges grands comme nature […] ; deux autres anges de même grandeur, à l’entrée du chœur, servent de pupitre pour chanter l’Épître & l’Évangile ».
Comme dans maintes églises parisiennes, le chapitre emploie quatre chantres ecclésiastiques, dont l’un exerce la fonction de maître des enfants de chœur. Jusqu’en 1775, les registres capitulaires qualifient les trois autres de hauts vicaires du chœur. Ensuite, pour une raison qu’on ignore, l’expression « vicaire de chœur » s’impose. Celle utilisée dans les comptes du chapitre pour désigner ces chantres est « officiers du chœur ». Avec le maître des enfants de chœur, ils touchent chacun 216 livres à l’année pour assister à l’office canonial. Les actes capitulaires de la seconde moitié du XVIIIe siècle ne révèlent rien sur ce que les chanoines attendent d’eux concernant le chant. La place de chantre n’étant pour eux qu’une étape avant l’obtention d’un bénéfice, ils restent la plupart du temps moins de cinq ans en activité. Le 15 juillet 1758, l’abbé Louis François FERRÉ, haut vicaire de chœur, prie la compagnie d’accepter sa démission, car il vient d’être proposé pour une cure à Angers. Le chapitre le remercie de ses services à l’église « tant par son assiduité à l’office canonial que par son bon exemple ». En 1790, trois des quatre places de vicaire de chœur sont pourvues. Éléonor Robert HAREL fait figure d’exception par sa longévité en poste (quatorze ans). Son collègue Charles Joseph BEAUSSIEU a, lui, été recruté en 1788. Le maître des enfants de chœur Antoine Claude HARELLE (sans lien de famille avec le premier) a débuté son service la même année en remplacement de Pierre Merry MONTERET, lequel avait été reçu trois ans plus tôt. La dernière place n’a plus de titulaire depuis le départ, en 1787, de Jean-Baptiste LE TELLIER, nommé aumônier de l’Hôtel-Dieu. Michel François BOULANGER, le diacre d’office, a ensuite été « verbalement » chargé de faire les fonctions de vicaire de chœur, mais il obtient une cure en 1789. Les comptes de la fabrique montrent que seulement deux chantres ecclésiastiques assistent aux offices paroissiaux : les sieurs MONTERET et FULCHIE en 1786, donc sans doute leurs successeurs HARELLE et BEAUSSIEU en 1790. Ils perçoivent chacun 75 livres à l’année pour leur présence.
Deux laïcs, qualifiés le plus souvent de choristes dans les délibérations capitulaires, complètent l’effectif des chantres : Guillaume PAILLARD et Jean Michel GAILLIER. Le premier, admis en 1773, paraît doté de réelles compétences musicales puisqu’il a été chargé, l’espace de quelques semaines en 1777, d’instruire les enfants de chœur après la retraite du sieur LE CHASSEUR. Il reçoit du chapitre 216 livres par an, de la fabrique 75 livres. Le second, engagé en 1780, a précédemment servi les chapitres de Saint-Étienne-des-Grès et de Saint-Benoît. Il touche le même salaire que son collègue et complète ses revenus grâce à son métier de tailleur. Appréciés, les deux hommes obtiennent régulièrement des gratifications : 3 livres chacun, par exemple, pour leur participation aux prières de Quarante-Heures ordonnées pour l’ouverture des États généraux (15 mai 1789). Le 15 décembre 1782, le chapitre décide de « soulager les deux chantres [...] et de concourir à la plus grande décence de l’office divin en donnant aux dits chantres deux aydes de cœur [sic] ». Leur tâche est d’assister à la messe et à vêpres tous les dimanches et fêtes chômées de l’année, aux premières vêpres et à matines les veilles des fêtes solennelles et aux matines des fêtes de Pâques, Pentecôte, Noël et autres festivités importantes du calendrier liturgique. Le 4 janvier 1783, le syndic de la compagnie s’engage à verser 8 sols par office aux nommés GOUBET et GARNIER. La fabrique rémunérait déjà deux « chantres de paroisse étrangère » pour soutenir les chantres ordinaires le jour de la fête patronale : les mêmes hommes ? Le 28 août 1783, le chapitre décide de leur interdire l’entrée du chœur pour les matines et autres offices canoniaux au motif qu’ils refusent d’assister aux petites heures. On ne sait si la mesure vise les recrues du 4 janvier ou un autre duo. Quoi qu’il en soit, l’emploi régulier de chantres attachés à d’autres églises ne pouvait que poser problème sur le long terme, le chapitre ne possédant pas de réelle autorité sur eux. Par la suite, les délibérations n’évoquent plus du tout ces aides de chœur.
En matière de discipline, l’une des seules mentions critiques dans les registres est celle du 3 novembre 1781. Plusieurs chanoines ayant signalé que l’office se chantait « avec une précipitation scandaleuse » et que des officiers du chœur s’abstenaient fréquemment d’y participer, le chapitre convoque ses choristes pour leur donner un avertissement. Cette simple mesure semble avoir suffi à régler le problème.
L’introduction du serpent est tardive dans cette collégiale. En 1781, Maximilien François PARMENTIER, un doreur sur métaux qui joue occasionnellement du serpent dans les églises de la capitale, reçoit 10 livres pour sa participation aux messes canoniales des dimanches et fêtes des mois de novembre et décembre. Le 4 janvier 1783, il est recruté à titre permanent par le chapitre qui lui octroie 8 sols par office pour son assistance aux messes des dimanches et fêtes et aux offices qui lui seront désignés par le syndic. Cet engagement paraît lié à celui des aides de chœur : les chanoines entendent donner plus d’éclat aux cérémonies dominicales et fêtes majeures de l’année. La fabrique, de son côté, lui verse 120 livres de gages au milieu de la décennie. PARMENTIER reste au service de la paroisse après la suppression du chapitre, épaulé par un deuxième serpent, Jean-Baptiste BLONDEAU.
Le terme « maîtrise » n’est pas utilisé au sein du chapitre de Saint-Merry, dont le fonctionnement rappelle celui de Sainte-Opportune. Le compte de 1780 indique que M. DECAURE, maître des enfants de chœur, reçoit 84 livres « pour ses appointements en lad. qualité ». Les quatre enfants de chœur perçoivent 144 livres « pour leurs gages pendant lad. année », plus 106 livres 15 sols pour leur part « aux convoys faits au chœur » et 22 livres 10 sols pour les saluts et fondations, deux sommes versées par le clerc des convois (les montants varient d’une année à l’autre : en 1779, par exemple, les enfants se font remettre 60 livres et 20 livres 16 sols). Constat significatif : aucun fonds n’est prévu pour l’entretien annuel des enfants. Les divers prestataires (perruquier, cordonnier, bonnetier, tailleur, marchand de bois, cirier, blanchisseuse, ravaudeuse) sont payés au coup par coup par le syndic (total : 218 livres 18 sols). Les comptes de la période 1771-1780 ne révèlent pas quelle caisse règle les frais alimentaires. Il ne s’agit pas de la fabrique, qui ne dépense rien pour les enfants de chœur entre 1785 et 1787.
Les enfants dorment dans une « chambre » au cinquième étage d’un immeuble voisin de l’église. Le 6 décembre 1790, les officiers municipaux y découvrent deux vieux lits de sangle, deux petits matelas de laine couverts de toile à carreaux, deux paillasses de grosse toile, deux traversins de gros coutil, deux vieux rideaux, un vieux bas d’armoire à deux battants, trois tabourets, un pot à l’eau et deux gobelets d’étain, quatre paires de draps et deux torchons. Le maître, qui loge à côté, forme les enfants chez lui. Le 15 juillet 1777, il se plaint d’un dénommé Gérard qui occupe une petite chambre au cinquième « conservée pour le logement du second vicaire de chœur » : l’homme frappe contre les murs, troublant le repos des locataires « et particulièrement le sien lorsqu’il [est] occupé à donner des leçons aux enfants de chœur », accuse-t-il. La compagnie donne congé au gêneur par voie d’huissier. Les cours se limitent probablement à l’apprentissage du cérémonial religieux et à des notions de plain-chant.
Le service d’un enfant de chœur dure normalement six ans, comme le rappelle une délibération du 14 décembre 1774 qui accorde la gratification « ordinaire » de 144 livres à Pierre THIERRY, premier enfant de chœur arrivant au terme de sa formation, pour l’aider à apprendre un métier, à raison de 24 livres par année de service. En réalité, les nombreux enfants sortis avant ce terme reçoivent presque toujours une récompense calculée au prorata de leur temps de présence. Fin 1790, les quatre élèves d’Antoine Claude HARELLE sont Sylvain PIAU, Louis GUILBERT, Simon VUILLIER et Louis MOREL. La municipalité, prévoyant qu’ils demeureront au service de la paroisse, leur abandonne les vêtements cléricaux et liturgiques trouvés dans leur chambre (quatre soutanes, quatre camails, trente aubes, trente amicts, douze ceintures à glands, douze cordons) et les huit antiphonaires « étant à l’usage journallier des enfants de chœur de lad. paroisse St Merri ». Le second ne figure plus sur la liste des employés d’août 1791. Même HARELLE, qui a pourtant juré fidélité à la Constitution civile du clergé, a renoncé à ses fonctions au profit de François Hubert LAMY.
Deux musiciens de renom ont été titulaires de l’orgue de Saint-Merry : Camille SAINT-SAËNS de 1853 à 1857 et Norbert DUFOURCQ de 1923 à 1990. Sous le règne de Louis XIV, il faut citer Nicolas LEBÈGUE et Jean François DANDRIEU, et au milieu du XVIIIe siècle Nicolas Gilles FORQUERAY. L’organiste en poste en 1790 est Philippe Antoine DESPREZ, reçu en 1761 ou 1762 à la place du précédent. Employé par la fabrique (300 livres par an en 1787), l’organiste n’est quasiment jamais mentionné dans les délibérations capitulaires. Celle du 1er septembre 1783, exceptionnellement, évoque la durée excessive d’un office de matines due à la « prolixité de l’organiste » (non nommé). Titulaire de quatre tribunes à la veille de la Révolution dont celles du Saint-Sépulcre et de la cathédrale (en alternance avec trois collègues), DESPREZ fait partie de ces artistes en vogue mentionnés dans les almanachs musicaux et même les guides de voyage, qui attirent une foule de mélomanes à l’occasion des grandes cérémonies. La fête patronale, lors de laquelle le bas chœur est renforcé par des chantres externes (quatre en 1782), est la principale : les 28 (veille de la solennité) et 29 août 1786, DESPREZ touchera l’orgue à tous les offices, écrit le Journal de Paris du 27 août, ce qui sous-entend qu’il se faisait souvent suppléer en temps normal, peut-être par son fils Nicolas Philippe. Malgré son âge avancé, il reprend du service après la réouverture de l’église : le 2 février 1796, la fabrique lui verse 300 livres pour la remise en état du buffet endommagé par le soufre du salpêtre et le réengage le 5 juillet 1797 à la fois pour jouer et accorder l’instrument, moyennant la somme modique de 150 livres par an.
L’orgue confié à DESPREZ fut conçu de 1647 à 1650 par François de HÉMAN et Germain Pilon pour le buffet en remplacement d’un orgue du XVIe siècle posé sur une petite tribune au fond du croisillon sud. Comportant à l’origine 35 jeux sur trois claviers et pédalier, l’instrument fut par la suite augmenté par différents facteurs, le dernier en date étant François Henry CLICQUOT, de 1778 à 1782. Le 11 juillet 1792, Charles Fusée-Aublet, fils du savant Jean-Baptiste Christophe Fusée-Aublet, aurait dissuadé une bande de vandales de le mettre en pièces en montant à la tribune pour interpréter la Marseillaise et le Chant du départ. Aristide Cavaillé-Coll le reconstruisit à l’époque de SAINT-SAËNS en prenant soin de préserver le buffet et la tribune (installée en 1755), qui n’ont pas changé depuis 1790.
••• Le Saint-Sépulcre, un lieu de culte cher aux confréries de métier
Construite à partir de 1326 au cœur du quartier des Halles, presque en face du cimetière des Saints-Innocents, rue Saint-Denis, la collégiale du Saint-Sépulcre tient son nom de la confrérie éponyme constituée de bourgeois en partance pour Jérusalem ou de retour du pèlerinage en Terre Sainte. L’appui de Louis de Bourbon et de Clémence de Hongrie et l’argent des confrères permirent la construction et l’essor rapide de cette église devenue paroissiale au début du XIVe siècle. L’hôpital du Saint-Sépulcre, construit à côté de l’église, resta inachevé. Entre la confrérie, structurée dès 1330 (800 membres à cette époque), et le personnel curial, la cohabitation ne fut jamais sereine. L’évêque de Paris abandonna ses droits en 1333 au profit du chapitre de Notre-Dame. Treize des seize chapellenies d’origine furent érigées en canonicats à la fin du XIVe siècle. La guerre de Cent Ans ruina l’établissement et la confrérie du Saint-Sépulcre vit son autorité décliner pendant les Guerres de Religion. Parallèlement, de nombreuses confréries de métiers vinrent y établir leur siège à partir du XVe siècle, dont la puissante confrérie des merciers. En août 1678, comme plusieurs autres établissements, le Saint-Sépulcre fut brièvement réuni sur ordre de Louis XIV à l’ordre hospitalier de Saint-Lazare. Les chanoines recouvrèrent finalement l’administration de tous leurs biens en 1694, tout en restant placés sous l’autorité des chanoines métropolitains. La crise financière du début du XVIIIe siècle fut surmontée grâce à la suppression de quatre canonicats. En 1761, le chapitre obtint du chapitre de Notre-Dame l’autorisation de solenniser la fête de sainte Constance, martyre, le troisième dimanche après Pâques, et de faire appel pour l’occasion, et pour une procession la semaine suivante à quatre chantres et à un serpent « étrangers ». Les reliques avaient été obtenues du pape en 1759. Les chanoines espéraient voir s’accroître la fréquentation de leur église autour de la châsse placée dans l’une des chapelles. Turgot, en 1776, porta un coup très dur à l’établissement en supprimant les corporations et par conséquent les revenus tirés de la présence des confréries de métier.
Église Saint-Sépulcre près Saint-Méry, dessin, XVIIIe siècle (source gallica.bnf.fr / BnF, Estampes et photographie, RESERVE FOL-VE-53 E)
Devant l’église, un beau portail attire le regard. Les échoppes qui l’entourent ou les commerçants ambulants (fruitières, bouquetières) gênent la circulation, au grand dam des huissiers capitulaires (octobre 1760). Derrière l’édifice s’étend un cloître, avec son jardin très fréquenté par les enfants du quartier, autour duquel a été construit un bâtiment de six étages où logent les deux chantres, d’autres bâtiments plus modestes et des maisons canoniales, la plupart baillées à des locataires laïcs. La déclaration des biens du chapitre de février 1790 mentionne plusieurs maisons disséminées dans la capitale, des terres à Sarcelles et des rentes. Le chapitre, très endetté, doit en 1790 15 216 livres à différents ouvriers pour des travaux de rénovation. Le procès-verbal de scellés décrit une vaste pièce située derrière le chœur servant de chapitre, de sacristie et de trésor. L’argenterie pèse 93 marcs. Le chœur recèle des stalles en bois de chêne sculptées, « un lutrin en forme d’aigle, trois bancs de chantres couverts de maroquin, un marchepied, un pupitre le tout de bois de chêne, deux rangs d’estals [sic] garnies de six pupitres avec quatre sièges d’enfants de chœur ». Pour la célébration du culte, chanoines et chantres utilisent dix livres, tant missels que psautiers et antiphonaires, reliés en veau. Dans la nef, on remarque un « buffet d’orgues avec une porte d’entrée en dessous et figures le tout en bois sculpté ». La collégiale, à l’emplacement du n° 60, rue Saint-Denis, et les bâtiments annexes, furent achetés en 1791 par une compagnie de négociants hollandais, démolis et remplacés par d’élégantes maisons de commerce.
Grâce au produit de deux prébendes (2 500 livres en 1788), le chapitre rémunère deux chantres, un diacre et un sous-diacre d’office, des enfants de chœur et un suisse. En 1790, les deux choristes sont Charles François WATEL, engagé en mai 1785, et Gaspard MOREAU, ancien chantre de la paroisse Saint-Jacques-de-l’Hôpital, reçu en mars 1789, qui fait aussi office de maître des enfants de chœur. Cette fonction, sans doute financièrement peu attractive, ne reste jamais très longtemps entre les mains du même titulaire : six maîtres se succèdent dans les années 1780. En juin 1789, le chanoine Bachelay est élu « pour être préposé au chœur et à la maîtrise, avoir soin des cérémonies et veiller sur les enfants de chœur et leur maître ». Un serpent et un organiste soutiennent le chant. Le premier est le sieur BOURBON, reçu en août 1786. L’orgue est confié depuis juillet 1757 à Philippe Antoine DESPREZ, également en fonction à la collégiale Saint-Merry. Le 16 décembre 1775, les chanoines prennent connaissance d’une admonestation du chapitre de Notre-Dame, qui leur reproche d’avoir permis l’impression d’« affiches scandaleuses » annonçant l’exécution de noëls par DESPREZ. Une délibération leur interdit « de permettre à l’avenir qu’il soit touché de l’orgue dans leur église hors le tems des offices, et d’y laisser exécuter pendant les offices aucune pièce de musique autre que celles qui par leur nature sont destinées à la majesté du service divin et au respect dû au temple du Seigneur ». En février 1758, le chapitre s’inquiète du mauvais état de son instrument et entreprend d’y faire des réparations. Il prévoit aussi la construction d’un nouveau buffet. La dépense serait de 3 200 livres « tant pour le facteur que pour le menuisier ». Les chanoines, qui ont envisagé de renoncer à leur orgue, finissent par reconnaître qu’ils ne sont pas « dans la possibilité de supprimer un instrument qui est d’un usage en notre Église aussi ancien que l’Église et sans lequel les confrères ne voudront plus faire célébrer les offices et iroient ailleurs ». En août 1765, c’est au facteur François Henry CLICQUOT qu’ils s’adressent pour la construction d’un nouvel orgue. Le prix s’élève à 3 600 livres « y compris le buffet peint et placé ». L’« ancien du chapitre » (le plus ancien en place) paie plus de la moitié de la somme de sa poche. La compagnie en profite pour faire réparer la tribune, « mettre une fleur de lys à la couronne qui est au milieu de la tribune » et blanchir les travées de la nef aux alentours de l’instrument. CLICQUOT propose en mai 1767, pour 200 livres, une augmentation de « cinq notes de pédale », ce qui rendrait l’instrument « plus harmonieux pour l’exécution du plain chant ». L’orgue est reçu le 31 janvier 1769 « par Mr Couperin, organiste du Roy ».
Le maître des enfants de chœur veille sur quatre enfants. Admis souvent, semble-t-il, à plus de dix ans, ils sont formés au chant (en février 1776, le jeune BARDON est renvoyé parce qu’il a « peu de voix »), mais pas à la musique. L’aîné des enfants de chœur, en 1790, semble être le dénommé RAGON. Jacques Antoine FROIDEVAL, reçu en 1785, s’en va en janvier 1790 avec une gratification de 96 livres. Pierre DUVAL et Thomas DUVAL, peut-être apparentés, ont été reçus en mars et avril 1789. Une pièce ou « chambre qui sert de maîtrise » (délibération du 4 août 1763) est réservée à ces enfants au cinquième étage du grand bâtiment. Les officiers municipaux y trouvent « quatre couchettes à bas piliers garnies chacune d’une paillasse de deux pieds de large, d’un matelas de même grandeur en bourre et laine couverts de différentes toiles, d’une couverture et traversin de coutil et plumes, une table et deux bancs de bois de chêne ».
IV - Une collégiale entre Louvre et Tuileries, Saint-Louis-du-Louvre
Ce chapitre classé à part naît de la fusion, en 1740, de deux établissements situés près du Vieux Louvre. Le plus ancien de ces chapitres, Saint-Thomas-du-Louvre, fut fondé en 1187 grâce à un legs de Robert, comte de Dreux, frère de Louis VII. Cette collégiale placée sous l’invocation de saint Thomas de Cantorbéry, initialement desservie par quatre chanoines, offrait une formation et des soins à de jeunes clercs d’origine modeste. Au début du XIIIe siècle, une contestation s’éleva entre les chanoines et le recteur placé à la tête du petit collège. Une transaction homologuée par le pape en 1217 accorda une pleine autonomie à ce dernier. Une chapelle dédiée à saint Nicolas fut bientôt édifiée pour les dévotions du maître et de ses étudiants. En 1541, l’évêque de Paris Jean du Bellay supprima recteur et boursiers et érigea le collège en chapitre – Saint-Nicolas-du-Louvre – composé d’un prévôt et de quinze chanoines. Saint-Thomas-du-Louvre comptait de son côté onze chanoines à la veille de l’effondrement du plafond de l’église, en 1739.
L’orfèvre et architecte Thomas Germain conçoit les plans de la nouvelle église, bâtie de 1740 à 1745 sur les ruines de Saint-Thomas. Par sa façade convexe et ses ailes concaves, elle rappelle la basilique Sainte-Croix-de-Jérusalem, à Rome, où l’artiste a passé sa jeunesse. L’historien Saint-Victor, qui écrit au début de l’Empire, évoque des « formes bizarres » et une voûte trop chargée. L’intérieur abrite, outre des tableaux de Restout, Coypel et Pierre, « le mausolée de M. le cardinal de Fleury, garni dans le bas d’un écusson et des attributs cardinaux et épiscopaux en bronze et cuivre […], entouré d’une grille » (1790), œuvre de Jean-Baptiste Lemoyne. En 1749, l’archevêque de Paris ordonne la réunion du chapitre de Saint-Maur-des-Fossés à celui de Saint-Louis-du-Louvre. Le nombre de chanoines s’établit alors à vingt, plus un prévôt et un chantre. À la veille de la Révolution, les deux dignités et quinze prébendes sont à la nomination de l’archevêque, quatre autres à celle du duc de Penthièvre et la dernière à celle de la famille de Gallicher (à l’origine une chapellenie fondée par Martial Gallicher, archidiacre de Brie, transformée en prébende de Saint-Nicolas-du-Louvre en 1559).
Dépourvue d’orgue, la collégiale met surtout à l’honneur le plain-chant. Le mobilier de l’église en témoigne : « Trois tabourets de chantres couverts de maroquin rouge garnis de leurs marchepieds, un aigle servant de lutrin à deux faces et un petit pupitre au bas […], le tout de cuivre » et, près de l’autel, « deux lutrins en bois sur leurs pivots de fer et cuivre ». Le procès-verbal de 1790 recense encore quarante-cinq livres d’Église dont six processionnaux, six missels, cinq antiphonaires, sept graduels, quatre psautiers et « l’office de St Nicolas et celui de St Louis nottés ». Pour le chapitre, la bonne conservation de ces ouvrages est primordiale : le 16 octobre 1775, il ordonne « que les livres de chant et autres de notre église [soient] raccommodés par le relieur proposé par M. Gérard [un des chanoines], lequel a été prié de vouloir bien veiller à ce que ce raccommodage [soit] fait avec soin ».
Les chanoines de Saint-Louis-du-Louvre emploient deux chantres ecclésiastiques qu’ils qualifient de vicaires ou vicaires de chœur, comme dans d’autres collégiales parisiennes. En tant que prêtres, ils sont spécialement chargés de dire les messes basses. Une délibération du 15 juillet 1788 rappelle leurs devoirs en matière de chant : « La compagnie a mandé Mr Fauquel et lui a enjoint très formellement et très expressément qu’elle vouloit et entendoit qu’il descendît au lutrin et chantât avec les chantres ainsi qu’il l’avoit fait pendant nombre d’années ». Une semaine plus tard, Pierre Joseph FAUQUEL, qui n’a toujours pas obtempéré, est menacé de renvoi. Il a forcément fini par s’exécuter puisqu’il fait encore partie du personnel en 1790, au côté d’Antoine LE NORMANT, qui exerce la double fonction de vicaire de chœur « de la paroisse Saint-Louis-du-Louvre », dont le ressort s’étendait sur le cloître Saint-Thomas et les maisons de l’ancien doyenné, et de sacristain. Le diacre d’office se joint probablement à ses collègues autour du lutrin en certaines occasions. En effet, l’homme qui occupe le poste en 1790, Étienne Magloire LANNUIER, signe le 4 mars 1790 un billet relatif aux gages des chantres, vicaires et officiers de Saint-Louis et se présente comme « vicaire de Saint-Thomas-du-Louvre » [sic] lorsqu’il prête serment de fidélité à la Constitution civile du clergé l’année suivante, à l’instar de FAUQUEL. Le recours à ces vicaires pourrait remonter à une époque assez récente. Retraçant en 1775 la longue carrière du chanoine Antoine Claude Ballin, dernier adversaire de la bulle Unigenitus au sein du chapitre, les Nouvelles ecclésiastiques rapportent qu’il s’opposa « de toutes ses forces » à une initiative d’un chanoine hebdomadier qui voulait admettre des vicaires de chœur pour la célébration du Saint Sacrifice : « Nous sommes assez de chanoines, disoit-il, pour nous suppléer mutuellement ; nos confrères de Saint-Nicolas n’avoient point de vicaires, & il leur étoit défendu d’en avoir, quoiqu’ils fussent en plus petit nombre » (Nouvelles ecclésiastiques, 15 mai 1775).
Les chantres laïcs, au nombre de quatre, touchent 400 livres de gages par an, mais leur revenu est en réalité supérieur à 600 livres grâce au casuel et à leur participation aux saluts et autres fondations. Certains, dont les chanoines apprécient le zèle, peuvent se voir confier diverses responsabilités. Le 15 juillet 1775, le receveur du chapitre est autorisé à donner une gratification de 24 livres à Marcel TREMBLAY « pour les feuilles de la pointe depuis qu’il a commencé à le faire jusqu’à présent et pour la table des offices par lui transcrite depuis peu ». L’article 2 du règlement du 16 avril 1784, qui porte surtout sur les pénalités qui leur sont infligées en cas de d’absence ou de retard aux offices, donne un aperçu de leurs obligations. Par exemple, « celuy qui doit chanter la première leçon de matines aura soin de préparer le livre et de marquer les leçons du lendemain dès la veille après les vespres [et] celuy qui doit chanter la première leçon aux messes des quatre tems aura pareillement attention de préparer le livre aussitôt après matines ». En 1790, l’équipe est constituée de deux frères, Louis Joseph GÉRARD, dit l’aîné, et Charles Antoine GÉRARD, le cadet, d’Antoine Augustin DARCOURT et de Guy Louis GRANDJEAN. Nés vers ou après 1760, les trois premiers sont originaires de Picardie. Le plus expérimenté, DARCOURT, a précédemment servi les chapitres de Saint-Merry et de Saint-Benoît. Le quatrième, un peu plus âgé, a grandi en Lorraine où il a travaillé comme maître d’école avant de s’installer à Paris vers 1784. Un serpent complète l’effectif. Recruté en 1788 à l’âge de 22 ans, Edme MINÉ, natif de la région d’Auxerre, a auparavant enseigné la musique aux pages du prince de Conti. En 1790, il déclare 594 livres de gages et un casuel d’environ 100 livres.
Collégiales Saint-Louis-du-Louvre et Saint-Honoré, détail du Plan routier de la ville et faubourg de Paris, 1774 (source gallica.bnf.fr / BnF, Cartes et plans, GE C-9975)
La fonction de maître des enfants de chœur échoit toujours à un chantre laïc. GÉRARD l’aîné l’exerce en 1790 moyennant 500 livres d’honoraires. Il demeure au premier étage d’une maison canoniale donnant d’un côté sur le cloître Saint-Nicolas, de l’autre sur la rue Fromenteau. Son appartement comporte deux pièces, l’une servant d’école, dans laquelle est aménagé un petit cabinet fermé par une cloison, qui paraît servir de vestiaire (à l’intérieur : dix tablettes et trois porte-manteaux), l’autre avec vue sur cour, où est également « pratiqué » un cabinet, qui pourrait tenir lieu de dortoir. Pour les cérémonies, les six enfants disposent de douze soutanes de drap écarlate dont six qualifiées de « mauvaises », six chapes de serge noire et six camails à queue de vieux drap noir. Le budget annuel consacré au renouvellement et à l’entretien de leur garde-robe s’élève à 100 livres. Le chapitre leur assure 36 livres de gages et une prime de départ de 200 livres, plus une culotte, une paire de bas et deux paires de souliers (décision du 27 mars 1788). Reçus sur concours vers l’âge de 8 ou 9 ans, ils servent normalement l’espace de six années. Les noms de quatre enfants en activité lors de la suppression du chapitre nous sont connus par un mémoire des employés présenté à la municipalité : Jean Nicolas MARQUANT, François Marie SORDET, Jacques François Sébastien MAUTURIER et Louis ÉLIOT. Les deux autres pourraient être Alexis CONGO et Jean CHARIER, respectivement admis en 1786 et 1787. Sans doute doué pour la musique, l’aîné des enfants, MARQUANT, recevait en 1790 des leçons de serpent d’Edme MINÉ, payées par sa mère (quittance de février 1791 : 114 livres 17 sols pour une année entière), donc en complément de la formation donnée par GÉRARD.
Lorsqu’en octobre 1789, les chanoines apprennent que Louis XVI et sa famille s’installent au palais des Tuileries, ils envoient une députation au grand aumônier de France pour lui proposer d’utiliser la collégiale comme chapelle royale. En charge du service divin, ils échapperaient ainsi à la mesure tant redoutée de suppression des chapitres. La démarche n’aboutira pas. En 1791, la municipalité accorde l’église aux protestants. Une inscription est placée à la porte : « Oratoire pour les chrétiens qui suivent la réforme de Calvin ». Dans le chœur, une chaire remplace le grand autel et un petit orgue a été installé du côté gauche. Fermé fin 1793, l’oratoire rouvre ses portes en 1802. Cependant, moins de dix ans plus tard, les protestants sont priés de quitter les lieux car l’édifice doit être détruit dans le cadre d’une campagne de travaux pour relier le Louvre aux Tuileries. La salle du Manège, dans l’aile Denon du musée du Louvre, est construite sous le Second Empire à l’emplacement exact de la collégiale.
***
Avec ses neuf collégiales qui constituent autant de lieux de musique, Paris se démarque nettement des autres villes du royaume. La Sainte-Chapelle du Palais, où s’activent vingt-huit musiciens et enfants de chœur – sur un peu plus d’une centaine d’individus en fonction en 1790 –, est sans rivale dans la capitale : seule la cathédrale Notre-Dame peut lui être comparée. Par la qualité de la formation délivrée aux enfants de chœur et par la place accordée à la musique dans les cérémonies, Saint-Honoré fait toutefois plus qu’honnête figure. Les sept autres établissements présentent des caractéristiques similaires à la majorité des collégiales françaises, qui privilégient le plain-chant à la musique. Certaines spécificités méritent d’être soulignées : présence généralisée de chantres ecclésiastiques appelés vicaires de chœur, recours à des aides de chœur pour soutenir les choristes titulaires, en particulier lors des fêtes patronales, attachement des chapitres à leur bas chœur et à leur orgue, entretenu avec le plus grand soin, dans le contexte pourtant difficile (endettement, cherté des denrées) qui caractérise la période prérévolutionnaire. Dans deux cas au moins (Saint-Étienne-des-Grès et Saint-Merry), on constate une volonté manifeste de développer la pratique musicale, malgré des moyens limités, comme si la pérennité de l’institution était en jeu.
François CAILLOU et Christophe MAILLARD
Chercheurs associés au Laboratoire TEMOS (TEmps, MOnde, Sociétés) UMR 9016 CNRS
(Avril 2025)
Le travail sur les musiciens des collégiales de Paris a bénéficié des apports de : Guillaume Avocat, Youri Carbonnier, Bernard Dompnier, Sylvie Granger (†), Isabelle Langlois, Gaëtan Naulleau et Françoise Noblat.
Mise en page et en ligne : Caroline Toublanc (CMBV)
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Les lieux de musique dans les collégiales de Paris en 1790
Diocèse de Paris
- Collégiales
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- Collégiale Saint-Marcel
- Collégiale Saint-Merry (également église paroissiale)
- Collégiale du Saint-Sépulcre
- Collégiale Sainte-Opportune (également église paroissiale)
Pour en savoir plus : indications bibliographiques
Sources imprimées
- Almanach Musical, Paris, Au Bureau de l’Abonnement, 1775-1783.
- Arrest du parlement concernant la Jurisdiction du Chapitre de l’Eglise de Paris sur les quatre Eglises, de Saint Etienne des Grès, Saint Benoît, Saint Merry & du Saint Sepulchre & confirmatif du Règlement fait par le Chapitre de l’Eglise de Paris le 9 mars 1751, Paris, De l’Imprimerie Louis Cellot, 1763.
- Nicolas BOILEAU-DESPRÉAUX, « Le Lutrin », Œuvres, Paris, Veuve Alix, 1764.
- Calendrier Musical Universel, suite de l’Almanach Musical, Paris, 1788-1789, Genève, Minkoffs Reprints, 1972.
- Henri Gabriel DUCHESNE, La France ecclésiastique…, Paris, Chez l’auteur, 1768-1788.
- Jean Joseph EXPILLY, Dictionnaire géographique, historique et politique des Gaules et de la France, Amsterdam et Paris, Chez Desaint & Saillant…, 1768, t. V, p. 470-472.
- François GUILLOT DE MONTJOYE, Description historique des curiosités de l’Église de Paris…, Paris, Chez C. P. Gueffier, 1763.
- Nicolas François JACQUEMART, Remarques historiques et critiques sur les abbayes, collégiales, paroisses et chapelles supprimées dans la ville et fauxbourgs de Paris, d’après le décret de l’Assemblée constituante du 11 Février 1791, Paris, Bureau de l’imprimerie de la Société bibliographique, 1792.
- JÈZE, État ou Tableau de la ville de Paris, considérée relativement au nécessaire, à l’utile, à l’agréable et à l’administration, Paris, Prault père, 1765.
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